Silvestri, de Paris Kentucky à ParisLongchamp pour Florent Couturier

Florent Couturier à Paris...mais dans le Kentucky !

Il est 15h30, heure française, lorsque l'on joint Florent Couturier par téléphone. L'éleveur revient d'une saillie, et pour lui, il est 9h30 au Kentucky: " Cela m'arrive encore de recevoir des coups de téléphone en pleine nuit (rires) !". Depuis 2008, cet ancien entrepreneur dans la micro-informatique s'est expatrié pour la majeure partie de son temps vers un autre Paris, celui du Kentucky, au milieu de la plus grande terre d'élevage des Etats-Unis. Déjà éleveur en France au Haras du Bois Carrouges, Florent Couturier n'arrivait pas à acheter la propriété qu'il voulait et est tombé sur cette ferme de pionnier avec 110 hectares lors d'un séjour aux Etats-Unis. Acheteur à Keeneland, il a décidé de déménager au pays de l'Oncle Sam avec sa famille, pour lancer une toute nouvelle aventure. Malgré cela, il s'apprête à courir la Poule d'Essai des Pouliches, à Paris toujours, mais Longchamp cette fois-ci, avec Silvestri. 

Florent Couturier explique: " J'ai toujours des juments en France au Haras du Bois Carrouges, que ne gère plus directement en ce moment. A cause du Covid, je ne peux plus rentrer aux Etats-Unis si je reviens en France... Heureusement, je pourrai suivre Silvestri via internet, même si j'aurais préféré être là. J'ai une dizaine de poulinières en France, et à peu près le même nombre dans le Kentucky. J'élève surtout des chevaux de gazon, même si comme vous le savez le dirt est majoritaire ici. On constate toutefois qu'il y a plus de partants et d'enjeux, et surtout moins de casse dans la filière du gazon ! Des programmes sont en train de se créer, d'autant que les riches propriétaires aiment de plus en plus acheter des chevaux de turf clé en main en Europe pour venir courir ici." 

Revoir le reportage réalisé en 2011 chez Florent Couturier par France Sire 

Florent Couturier s'est fait sa place dans le Kentucky, "même si j'ai toujours un accent bien français !". A Redmon Farm dans le Kentucky, il a déjà fait naître un gagnant de Gr.1, Decorated Invader, qui a gagné à 2 ans les Summer Stakes à Woodbine, avant d'être un malheureux 4e de la Breeders' Cup Juvenile Turf. Il a encore gagné 2 Gr.2 l'an passé, mais Silvestri est une pure française: " J'avais acheté sa mère à Keeneland pour 70 000 $, dans le but de la ramener en Europe. Elle était par Montjeu, d'une bonne souche black-type, qui s'est étoffée avec le temps." En 2013, Florent Couturier a donc acheté cette La Zubia, gagnante de 2 courses, d'abord en France chez Carlos Laffon Parias, qui est aujourd'hui le mentor de Silvestri ! Soeur de la gagnante de listed Limonar à l'époque, La Zubia a vu 2 ans plus tard son frère Talco remporter le Shoemaker Mile (Gr.1), tandis que ces dernières années, Spanish Mission, un neveu, s'illustrait au niveau groupe autour du monde. Bingo ! Ce Spanish Mission a encore gagné Gr.2 cet après-midi à York ! "Pourvu qu'il passe le mot à Silvestri", s'amuse Florent Couturier... C'est tout le mal qu'on lui souhaite !

La Zubia, la mère de Silvestri, en piste sous la selle d'Olivier Peslier pour Carlos Laffon Parias...on prend les mêmes et on recommence ! (APRH)

Revenue en France au Bois Carrouges, La Zubia a été saillie par Siyouni pour donner Silvestri. Présentée par le Haras de l'Hôtellerie aux ventes ARQANA, elle avait été acquise 380 000 € par Shawn Dugan pour Al Shira'aa Farms: " Depuis que je suis au Kentucky, je ne fais plus la préparation aux ventes, explique Florent. Cela a coincidé avec l'émergence d'une nouvelle génération de consigners, très professionnels, motivés, et avec un bon réseau. Guillaume Garçon, je l'avais connu aux Etats-Unis, et il travaille très bien. Je m'attendais à ce que Silvestri soit bien vendue, car le pedigree était vivant, Siyouni était en vogue, et la pouliche était superbe. De là à faire 380 000 €... Sa mère a un mâle par Shalaa qui doit passer aux ventes de yearlings cette année. Je l'ai faite saillie cette année par City Light, pour faire le même croisement que Silvestri."

Silvestri lors de sa victoire inaugurale à Deauville (APRH)

Silvestri, gagnante de son unique sortie à 2 ans, a confirmé son plein potentiel cette année, en se classant 2 fois deuxième, notamment dans le prix de la Grotte (gr.3). Bien évidemment, Florent Couturier suivra la course du Kentucky: " On sera en pleine matinée au Kentucky quand elle va courir. " Même s'il ne pourra pas être sur place pour ce grand moment, Florent Couturier ne regrette pas une seconde son installation aux Etats-Unis : " Nous n'aurions jamais trouvé cette propriété en France. Nous sommes bien ici, avec de belles terres. Le marché a considérablement changé aux Etats-Unis. Il y a énormément d'argent pour le haut de gamme, car il y a de plus en plus de gens fortunés ! Malheureusement, aux Etats-Unis, il y a des "super riches" et des "supers pauvres", mais l'entre deux est plus difficile. Il faut savoir s'adapter. Le marché est totalement différent. J'ai même quelques chevaux d'obstacle en France, surtout avec Jean Marie Callier, un ami, qui m'a beaucoup aidé quand je me suis installé au Kentucky. Nous avons eu Côtée Sud ensemble notamment. Je ne suis pas un fan absolu d'obstacle à la base, mais c'est un autre marché plus accessible, et on fait cela entre amis." 

De Paris Kentucky à Paris Longchamp, il n'y avait donc qu'un pas pour Silvestri, qui a une bonne chance de s'illustrer avec Olivier Peslier. Depuis son fief américain, Florent Couturier et sa famille suivront la course de près, avant de se lancer dans une nouvelle matinée de travail à Redmon Farm... Ainsi va la vie d'un éleveur, avec ses obligations, ses contraintes, mais aussi ses joies ! 

La puissante Silvestri offrira quoi qu'il arrive un beau moment à Florent Couturier (APRH)