L'écurie de Willie Mullins est-elle la plus dominante de l'histoire ?

Il y a quelques jours, Willie Mullins a réussi l’exploit d’être sacré meilleur entraîneur en Irlande et au Royaume-Uni la même saison. Une performance jamais réalisée depuis 70 ans, et le légendaire Vincent O’Brien. Le plus fascinant dans cette histoire est le fait que ce double titre n’était même pas un objectif pour Mullins en début de saison. Ce n’est qu’après un nouveau splendide Festival de Cheltenham, à la mi-mars que le maître entraîneur a vu qu’il était au coude à coude avec Dan Skelton et Paul Nicholls. Dès lors, en homme de défi, Mullins a décidé de jouer sa carte à fond en envoyant des chevaux courir à Ayr ou Perth, des hippodromes où son nom figure rarement sur les programmes. Ainsi avec seulement 160 partants, et en jouant le titre seulement durant deux mois, le maître de Closutton a réussi à dominer les poids lourds anglais sur leurs terres.

 

 

 

   En mars, Mullins est devenu le premier entraîneur de l'histoire à seller 100 vainqueurs au Festival de Cheltenham

 

 

A l’image d’un Aidan O’Brien dans l’autre discipline, Willie Mullins présente des statistiques hallucinantes, et ne cesse de battre ses propres records. A l’heure où nous écrivons ces lignes, l’écurie a réalisé son record de victoires avec un score dépassant les 280. A la veille de la dernière journée de la saison, les chevaux de Mullins ont épinglé 35 Grs.1, dépassant le record de 31 établis en 2016. Après la victoire d’Il Etait Temps dans le Barberstown Castle Novice Chase (Gr.1), Mullins est revenu à une victoire seulement du record de succès en Irlande établi par Dermot Weld. Et dire que de nombreuses stars de l’écurie comme Allaho, Energumene, Ferny Hollow entre autres, ont vu leur saison amputée à cause de blessure. L’infirmerie de Mullins est meilleure que l’effectif de 99% des autres entraîneurs …

 

 

 Malgré ses resultats hors normes, Mullins n'a pas pris la grosse tête

 

 

La puissance de feu de la Team Mullins a atteint cette saison un niveau jamais atteint. Cette écurie mammouth et ultradominante est le fruit de 35 années de travail de la part de cet ex-gentleman rider. Comme Aidan O’Brien, Mullins est souvent qualifié de « génie ». Un terme élogieux mais qui pourrait parfois donner l’impression que l’irlandais doit sa réussite à son statut d’élu des Dieux des courses, que son talent est inné et intrinsèque. Or, comme tous les grands champions, on s’aperçoit que son succès est dû à une réflexion, une organisation, un avantgardisme, et un goût du défi plus prononcé que chez les autres.

 

 

 

 

Mullins est à la fois un explorateur, un novateur, et quelqu’un d’extrêmement cadré, avec un programme et une feuille de route millimétrée. Dans bien des domaines, le metteur au point a été un pionnier. Pendant de nombreuses décennies, les entraîneurs anglo-irlandais ne juraient que par les hongres, il était quasi inconcevable de débourser de grosses sommes pour une femelle. Mullins lui n’en avait cure, et a tout raflé avec des grandes championnes comme Quevega, Bénie des Dieux ou Annie Power pour ne citer qu’elles. De même, il doit en grande partie son succès aux chevaux français. Là où les Elliott, Nicholls, ou Henderson se disputent souvent les meilleurs éléments des point-to-point, Mullins préfère quant à lui les performeurs français, repérés par son courtier hexagonal Pierre Boulard.

 

 

  Willie Mullins et son courtier français Pierre Boulard

 

 

En effet, dans une récente interview, Mullins saluait le travail des entraîneurs français avec leurs jeunes pousses. A 2 et 3 ans, les chevaux français sont endurcis et s’exercent à l’obstacle tandis que leurs homologues d’outre-Manche ne sont toujours pas débourrés. Malgré la réussite insolente de Mullins avec les « FR », les autres gros noms de l’obstacle ne suivent pas ce chemin, ou peut être ne peuvent-ils plus le suivre. En effet, de par ses formidables résultats, Mullins a gagné la confiance de tous les plus gros propriétaires du monde de l’obstacle, y compris des anglais. En effet, Cheveley Park Stud, les époux Donnelly, Ronny Bartlett, et tant d’autres ont confié leurs meilleurs chevaux à Mullins. Avec 200 chevaux sous sa coupe, dont près de la moitié sont du niveau « Cheltenham », l’écurie de Willie Mullins possède un alliage de quantité et de qualité jamais égalé. Dans le Racing Post il y a quelques semaines, Patrick Mullins, le fils de Willie déclarait ceci : « Si vous trouviez que la tempête Mullins soufflait fort, préparez-vous car elle va encore s’intensifier ! » Bon courage aux autres entraîneurs anglais et irlandais pour résister à la tornade Mullins …