L'histoire de DNA Pedigree: Wild Risk, un sauteur chef de race
10/06/2020 - Chef de race
Qui aurait cru qu'un tout petit cheval bai au physique douteux pouvait ensuite devenir un excellent cheval d'obstacle ainsi qu'un formidable père de gagnants... en plat ? C'est pourtant ce qui est arrivé à Wild Risk, qui a tout bonnement défié les lois de l'entendement en devenant un véritable chef de race, et dont l'histoire vous est racontée ci-dessous par Thierry Grandsir.
Wild Risk (1940-1967), par Rialto et Wild Violet (Blandford)
Les chiens ne font pas des chats. Cet adage, comme toutes ces formules si pratiques pour nous aider à comprendre le fonctionnement du monde qui nous entoure, comporte évidemment ses exceptions, ses limites. Et en matière d’élevage de galopeurs, Wild Risk est bien là pour nous le rappeler.
Wild Risk est né en 1940 au sein de l’élevage J.E. Widener. Malgré son très bon tempérament et une élégance magnifiée par une tête arabisante, le poulain n’avait rien d’un champion : petit bai très léger manquant d’envergure, étroit de poitrail, l’épaule droite, piqué sur ses appuis, les canons longs et l’antérieur droit agrémenté d’un pied bot. Sans espoir…
Son géniteur Rialto avait certes été un performer solide et non dénué de talent (17 victoires, deuxième du Prix de l’Arc de Triomphe de Kantar), mais sa production, à l’aube de la seconde Guerre Mondiale, n’avait rien d’exceptionnelle en soi. Il se recommandait de son père Rabelais, authentique Chef de Race en digne fils de St Simon, mais sa mère La Grêlée, inédite en course pour cause d’aplombs antérieurs désastreux, avait même été destinée à l’abattoir par son éleveur William Chanler. Elle fut sauvée in extremis par Jean Couturié, auquel elle donna dix vainqueurs pour devenir la grande jument-base du Haras du Mesnil !
Wild Risk avait pour mère la gagnante Wild Violet, une fille de Blandford et de la bonne Wood Violet (Ksar), une lauréate du Prix Quincey (Gr.3). Un papier difficile à juger, Wild Risk étant son premier foal.
Il débuta donc à réclamer, en mai de ses 2 ans, enchaînant quatre autres prestations médiocres à cet âge. Il remporta péniblement son maiden l’année suivante, à la cote de 100/1, avant de devenir un stayer suffisamment utile pour se placer deuxième du Prix de l’Espérance (Gr.2) et troisième du Prix Berteux (Gr.3). Mais il allait montrer un tout autre visage à la faveur de sa reconversion dans le sport illégitime, l’obstacle.
Sa tenue, son agilité, sa prédilection pour les pistes souples, ses bonnes dispositions et sa solidité firent merveille : neuf victoires en quatorze sorties dont le Grand Prix des 3 ans (Prix Cambacérès), la Grande Course de Haies de Printemps, le Grand Prix d’Automne, la Grande Course de Haies d’Enghien et, pour couronner le tout, la Grande Course de Haies d’Auteuil (aujourd’hui Gr.1) en 1944 et 1945 !
Heureusement pour lui, Wild Risk n’avait pas été privé de ses attributs masculins en cours de carrière, et se vit donc offrir l’opportunité d’entrer au haras en 1946. Sans grand espoir à vrai dire, un sauteur ne produit pas de gagnants classiques en plat, c’est bien connu…
Sauf que Wild Risk allait démontrer le contraire en se classant étalon tête de liste des pères de gagnants en plat en 1961 et en 1964, et en obstacles en 1966. Il fit la monte jusqu’en 1967, année de sa disparition à l’âge vénérable de 27 ans.
Wild Risk a produit les vainqueurs de 596 courses, les meilleurs ayant été Le Fabuleux (Prix du Jockey Club), Balto (Grand Prix de Paris, Ascot Gold Cup), Vimy (King George VI & Queen Elizabeth St.), Fils d’Eve (Derby Italiano), Worden II (Washington DCI St.), Wild Miss (Prix Vermeille), Tonnera (Prix Saint-Alary), sans oublier le sauteur classique Rush (Prix Cambacérès) !
Chef de Race Professionnel (vecteur de grand fond), Wild Risk a tracé via Le Fabuleux et Worden II (père de Bon Mot, grand-père de Carmarthen et Carvin), d’ailleurs tous deux issus de la même souche maternelle, et via Waldmeister au Brésil. Ses filles ont produit de nombreux bons performers, dont le Chef de Race Blushing Groom…
Le Fabuleux, le fils de Wild Risk le plus influent au haras
La réussite génétique de Wild Risk tient beaucoup à la transmission de son caractère, élément modérateur des lignées chaudes de Nasrullah et de Northern Dancer, d’où sa présence dans le pedigree de Arazi, Bering, Goldikova, Le Havre, Linamix, Pivotal, Unbridled ou encore Gémix. Il a même très bien croisé avec Klairon, pourtant lui aussi affublé d’un pied bot. Les chiens font parfois des chats…