DANEMARK : Soren Jensen, l'entraineur viking qui veut reconquérir Paris

17/08/2023 - Découvertes
Qui se rappelle que cet entraineur danois en blouson de cuir avait failli gagner le Prix Marcel Boussac... en 1979 ? Avant de prendre sa retraire, 44 ans plus tard, Soren Jensen, devenu une légende vivante dans son pays, projette de gagner le Prix Dollar cette année avec Good Fortune, avec qui il a déjà gagné cet hiver à Meydan.

 

Le 7 octobre 1979, un jeune entraineur danois de 24 ans, longiligne et lunaire sous ses cheveux longs, peine à rentrer dans les enceintes professionnels de Longchamp. Débarqué d'un petit village du Juttland au Danemark, il n'a jamais porté de costume de sa vie et débarque en blouson de cuir et pantalon patte d'eph ! Mais Soren Jensen n'a peur de rien. Il a pris sa licence en 1975... à 19 ans, avec pour seule expérience quelques courses montées en tant qu'apprenti, avant que son poids et sa taille ne ruinent sa carrière de cavalier, et un stage de 6 mois aux Etats-Unis.

 


Dans son écurie de Klampenborg au Danemark, Soren Jensen présente Good Fortune,vainqueur cet hiver à Dubaï, avec qui il vise le Prix Dollar à Longchamp.

 

Deux ans plus tard, à 21 ans, ce fils de maréchal-ferrant remporte son 1er Derby du Danemark avec un certain Ascot. Suscitant l'intérêt des propriétaires de la capitale Copenhague, le jeune génie se voit confier une fille de Belmont élevée en France. Nommée Pompoes, la pouliche aligne 7 victoires en Scandinavie, à chaque fois par KO. Jensen tente alors un pari : affronter l'élite mondiale du pur-sang, le jour de l'Arc de Triomphe à Longchamp, dans le Critérium des Pouliches devenu Prix Marcel Boussac (Gr.1). A la stupeur générale, Pompoes, alors confié à l'expérimenté jockey anglais Ray Guest, tient la tête à mi-ligne droite ! Elle ne sera rejointe que dans les dernières foulées par la championne Aryenne (future gagnante de la Poule d'Essai et mère de Quest For Fame), alors montée par Yves Saint-Martin.

 


Lancée à la corde par Ray Guest, Pompoes termine 2e du Prix Marcel Boussac à Longchamp le jour de l'Arc 1979, seulement rattrapée dans les dernières foulées par Aryenne, sous la selle d'Yves Saint-Martin.

 

La carrière internationale de Soren Jensen était lancée. Il a d'ailleurs quitté peu après sa campagne natale pour s'installer dans le centre d'entrainement de Klampenborg, sur l'hippodrome principale du pays, dans le cadre enchanteur du parc royal de 2000 hectares. Pourtant, il ne sortira plus tant que cela de son pays. Evidemment, au Danemark, et même s'il a culminé à 50 chevaux à l'entrainement, les effectifs globaux ne sont pas assez importants ni en quantité ni en qualité pour espérer conquérir le monde. Mais Jensen a toujours mis à profit la moindre chance. Parmi les nombreuses vedettes qu'il a entrainées, Soren Jensen a eu dans les années 90 la responsabilité de Federico, un vrai champion qui avait grandi au haras de la Reboursière pour le compte de Sven Hanson, puis été vendu à Deauville avant de rester 3 ans invaincu au Danemark.

 


Federico, un champion des années 90.

 

A 68 ans aujourd'hui, Soren Jensen a diminué son effectif à seulement 18 chevaux. Mais parmi eux, il tient une perle qui lui permettra de viser le plus grand objectif de sa vie : enfin gagner en France. " Nous avons déjà fini 2e dans un Gr.1. Si on pouvait gagner un Gr.2, ce serait formidable. Il y a déjà eu un cheval danois qui a gagné le Prix Dollar, il s'appelait Dano Mast et était entrainé sur les mêmes pistes où je travaille. Cela prouve que c'est possible. J'ai déjà gagné des Groupes en Allemagne et j'aimerais avant la fin de ma carrière gagner un groupe en France. J'adore les courses françaises que je suis tous les jours. J'ai donc mis une victoire en France dans ma "to do list" avant d'arrêter ! "

 


Good Fortune, lauréat de la Zabeel Cup sous la selle de Théo Bachelot, offre la 1e victoire pour un cheval danois à Dubaï...sous une pluie battante !

 

Plein d'humour, avec un anglais parfait, Soren Jensen ne plaisante en fait pas du tout ! Car Good Fortune est un vrai pur. Fils d'Appel au Maître, le meilleur cheval et étalon de tous les temps en Scandinavie, Good Fortune a été élevé à Hjortebo pour le compte de Jens Lauritzen, un puissant industriel du transport maritime mondial, par ailleurs président de l'hippodrome de Klampenborg. Et il a déjà porté les couleurs de son propriétaire et de son pays tout entier à la conquête de Dubaï l'hiver dernier, s'inscrivant comme le tout 1er cheval danois à s'imposer à Meydan, sous la selle de Théo Bachelot. Jensen ne connaissait pas le jockey français en provenance directe du Japon, mais ce dernier lui avait été conseillé par Pia Brandt, célèbre entraineur scandinave en France.

 


Marianne et Jens Lauritzen, les propriétaires éleveurs de Good Magic.

 

" Je suivais les courses de Dubaï depuis quelques années, sans avoir les chevaux assez bons pour y aller. Mais cet hiver, on en avait 2 pour cela : une pouliche de 2 ans et un bon mâle de 4 ans né au Danemark et qui porte un très beau nom : Good Fortune. Nous n'avons pu arriver que tardivement, mi décembre, pour débuter là-bas fin janvier, sans très bien savoir où j'en étais avec lui, car ce n'est pas un gros travailleur le matin. De plus, il préfère le terrain très souple. Et la chance d'avoir un terrain souple à Dubaï est proche de zéro ! "

 

 

Mais il s'est mis à tomber beaucoup d'eau la veille de la course, alors qu'il n'avait pas plu sur Meydan depuis 2 ans. Sous une pluie battante, Good Fortune s'est imposé de haute lutte. Aujourd'hui âgé de 5 ans, il semble au sommet de son art, vainqueur d'une Listed en avril, et récent 2e d'une nouvelle Listed le jour du Derby à Klampenborg, battu seulement d'une courte tête après avoir été très gêné à l'entrée de la ligne droite. Good Fortune disputera au préalable une épreuve majeure en Norvège à la fin août.

 

 


Soren Jensen sur l'hippodrome de Klampenborg.

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