Embellie "Fr" à Aintree : Saint Aré n'est pas fou pour autant
Prononcez le mot Saint Aré et vous comprendrez facilement les quolibets subi par cet innocent poulain sur l'état de son cerveau. Pourtant, Saint Aré est tout simplement le nom du Saint Patron de la ville de Decize, capitale "mondiale" de l'AQPS lors du fameux concours des modèles et allures à la fin août. Cet homme d'Eglise aurait vécu au 6e siècle et à sa mort, son corps placée sur l'eau dans une nacelle aurait remonté tout seul à contre courant le fleuve de la Loire entre Decize et Nevers. Autant dire que le mystère demeure...
Le Saint Aré d'origine, patron de la ville de Decize...
En tout cas, ce qui s'est produit pour le cheval à Aintree ressemble à un petit miracle aux yeux des turfistes. En effet, cet AQPS de 5 ans n'avait auparavant jamais disputé un seul groupe, ni même remporté une course en Angleterre en 4 tentatives. Il faut croire qu'il met toujours du temps mais progresse, finalement comme il l'avait fait en France lors de son début de carrière chez Alain Couetil, qui est un cousin éloigné à 3e ou 4e génération d'Andrée Cyprès, née Couétil dans la Manche. Après des débuts discrets en plat à 3 ans, Saint Aré était passé sur les haies à 4 ans a avait trouvé la victoire durant l'été aux Sables d'Olonne, ce après quoi il a été vendu par son propriétaire Audouin-Antoine Maggiar.
Jacques Cyprès dans ses prés
On utilise trop souvent le terme de "vieille souche d'AQPS", car ces lignées sont peu nombreuses, peu l'objet de commercialisation chez les mères et donc forcément vieilles...Mais là tout de même, Saint Aré remonte directement à la base de l'élevage d'AQPS de course crée par Pierre Cyprès, le grand-mère, et Bernard Cyprès, le père, dans l'immédiat après-guerre. Ainsi, la jument de base de cette famille, Anabella IV, est née en 1944 à Cercy-la-Tour.
Saint Aré à l'âge de 2 ans, après sa 1e place au concours de modèles de Cercy-la-Tour en 2008, tenu par Nicolas Cyprès, le fils aînée d'Andrée et Jacques Cyprès. Il n'a pas pu participer ensuite au concours de Decize, ayant sauté la barrière la veille en justifiant en l'occurrence son patronyme...
La souche n'a pas changé de main, juste de génération, depuis près de 70 ans ! Elle a donné toute la famille de Thierry Cyprès, qui brille de mille feux aujourd'hui avec notamment Porto Rico, mais aussi Italic, un des très rares étalons AQPS crées dans le Centre, qui après une très bonne carrière de course chez Luc Cacquevel (un membre de la famille), est devenu au haras le père de Al Capone II et The Fellow, élevée par Jacques Cyprès. Soeur ainé des Cyprès, Michèle Juhen a aussi une bonne jument de cette souche actuellement, nommée Tisane.
Saint Aré a été avec les bovins charollais comme le veut la tradition de la Nièvre (photos Fanny)
La mère de Saint Aré, Fortanea a été plus précoce que son fils, puisqu'elle a enchainé 4 victoires durant l'été de ses 3 ans pour l'entrainement d'Etienne Leenders, dont l'important Prix de l'Isle Briand au Lion d'Angers. Placée d'épreuves classiques en plat, Fortanéa était passé avec bonheur sur les obstacles, pour glaner 3 nouveaux succès et a quitté la scène sur une victoire à 5 ans en steeple à Ploermel. Avant Saint Are, Fortanea, grande jument toute noire, avait déjà donné deux bons coursiers : Naiade Mag (Kadalko) et Pazadena (Ragmar). Puis lorsqu'il a séparé ses juments, Fortanea est revenu à Jacques, mais ce dernier a eu beaucoup de malheurs avec et Fortanea se trouve aujourd'hui dans l'élevage d'Etienne Leenders.
Saint Aré provient de la même famille que le mémorable Italic
Déjà père de Rubi Ball, mais aussi du bon Rubi Light (élevé par Patrice Vagne, un autre cousin), Network traverse une très belle passe avec ce nouveau trophée. Noir comme son père et sa mère, Saint Are possède les mêmes bons tissus et l'expression de son père, mais avec un physique beaucoup plus gracieux. Le voilà gagnant de Gr.1, avec une allocation au vainqueur qui plafonne toutefois à 65.000 euros environ, c'est à dire une somme qu'un cheval de quinté à Auteuil peut remporter assez rapidement. Aujourd'hui, le Gr.1 anglais est comme le crime, il ne paie pas...
Saint Aré est noir comme son père Network, ici présenté à la station de Cercy.
Mais pour la gloire et surtout pour motiver les riches acheteurs britanniques à remplir les bourses vendeurs français, il est bon de décrocher ces timbales. Or, pendant les 2 premiers volets du tryptiques d'Aintree, les ex-français ont remporté les 6 Gr.1 du programme : Saint Are (Network), Big Buck's (Cadoudal), Nacarat (Smadoun), Quito de la Roque (Saint des Saints), Master Minded (Nikos) et enfin Zarkandar (Azamour). De plus, outre ce dernier, frère de Zarkava qui est né en Irlande, tous les autres sont nés en France de vieilles souches d'obstacle "ben de chez nous".