Guillaume Javoy, la vie et la mort sur un rondin de bois
Guillaume Javoy. (PHOTOS APRH)
Guillaume n'était pas du tout du sérail, sa mère travaillait au diocèse des armées et son père à la Lyonnaise des Eaux. Je lui ai fait connaître les chevaux car il avait physique adéquat et car il avait un sacré cardio, gagnant tous les cross à l'école. Sa première expérience a eu lieu chez mon oncle Yann Loizeau, éleveur de Ice Mood, Turnium, Mood War... au Haras de la Seiglière à Baigneaux (33)
Trois années plus tard, il traverse une bonne partie de la France afin d'apprendre son métier sur les pistes de Chantilly-Lamorlaye, un boxe l'attend chez François Marie Cottin. Ses copropriétaires, Jacques Liut, Jacques Villetorte et Philippe Lorain dont il porte les couleurs, le verront débuter à Cagnes-sur-Mer. Une 3e place "encourageante" malgré un style peu académique, Royal Palois fait preuve de caractère, respire mal et se jette plus qu'il ne saute. Il n'a pas encore 4 ans, Lute Antique ne fait pas des précoces au contraire...
Pas sûr de le revoir, le temps fera le reste... Par chance sa convalescence se passe bien, un an et sept mois plus tard, Royal Palois revient à l'entrainement avant de faire ses débuts dans le temple de l'obstacle, Auteuil. Avec un style qui n'a pas changé, il finit son parcours dans le lointain. Les deux courses suivante il en sera de même, Gallagher arrête Royal Palois dans la ligne d'en face et décide d'arrêter sa collaboration avec ce fracasseur de haies, il faut alors lui trouver un autre jockey.
Cet apprenti dresse souvent les chevaux compliqués comme Jakiloup notamment, qui vient de lui faire un clin d'oeil en s'imposant à Moulins cet après-midi même. Quelques jours plus tard, Royal Palois retrouve Auteuil dans un réclamer avec un nouveau partenaire sur le dos.
C'est encore loin d'être parfait mais il y a du mieux, son jeune jockey ne s'occupe pas de la course, il reste dernier décollé, isolé et n'entame sa progression qu'au milieu du dernier tournant. Ce nouveau duo termine 3ème devant Palk malgré des sauts très brutaux. Le début d'une histoire...
Guillaume Javoy avec Royal Palois.
Neuf jours plus tard, le duo est reconduit dans un handicap divisé, dernière épreuve de cette réunion d'Auteuil. Même tactique, il tire un bon coup sur les rênes dès le départ, l'isole, choisit un bon tracé, il le commande sans le commander, fait en sorte qu'il ne vienne pas trop sur le pied. Il le rapproche des autres chevaux le plus tard possible afin de lui donner du moral et profiter de sa pointe. Royal Palois saute un peu mieux une fois de plus, il accélère, transperce l'opposition et rejoint le poteau en vainqueur dans la pénombre de cette fin d'après midi d'automne, devançant de deux longueurs Esprit d'Orthe.
A ce moment là, Royal Palois commence sa progression et après la "der" Javoy envoie, déchainé. Ils finissent deuxième, coiffant au poteau le spécialiste des quintés Chant de lune. Les espoirs grandissent, le cheval n'a que 6 ans, un gros handicap est à portée de tir, le cheval finit vite. Qui sait, c'est peut être un futur Padisha Soy ? Le cheval tient son jockey et le jockey tient son champion.
Il sera décevant la course suivante mais remettra les pendules à l'heure dans le Pot d'Or. Royal Palois gagne son gros handicap, son compagnon aussi, en battant à la lutte Apple's Noa et le légendaire Christophe Pieux, ainsi que la regrettée Plume noire. L'apprenti réalise un rêve avec son cheval de coeur, son sourire éclatant comme jamais en dit long sur son bonheur. Cette victoire est et restera la plus belle victoire de sa carrière.
Le rêve se poursuivit avec deux superbes deuxième place dans le Violon II et le Montgomery avant de tenter La Haye Jousselin. L'histoire s'embellit de course en course après s'être placé de Gr.3, Royal Palois et Guillaume Javoy participent à leurs 1e Gr.1, qui plus est l'un des plus beaux. La distance va l'arranger mais l'opposition est excellente. Qu' à cela ne tienne, Royal Palois bon sauteur (qui l'eut cru) court du tonnerre, arrachant une 4ème place revancharde sur Odeillo du Mathan,
devançant Polar Rochelais, Top of the sky, Lord Carmont et devient en ce jour un vrai cheval de groupe. C'est la meilleure performance de sa carrière.
S'en suivront des fortunes diverses, une 2e place dans le Beugnot ainsi que dans le Hennessy entre Isnos et Don Mirande. Comme toutes les belles histoires, il y a une fin... Royal Palois prépare une nouvelle tentative dans la Haye Jousselin et de présente au départ du Héros XII.
Alors que son cheval s'apprête à jouer les places, il se retrouve entre deux chevaux pour sauter la double barrière et tous deux tombent violemment. Guillaume perd connaissance trois ou quatre secondes, une fois revenu à lui, il se roule jusqu'à la corde pour éviter les chevaux alors qu'ils sont déjà entrain de sauter la dernière, un nouveau trauma crânien à la clef. Royal Palois s'en sort indemne, un miracle.
Comme tout le monde le sait, Guillaume retombera violemment sur une barre d'appel en bois 7 jours plus tard, il perdra connaissance une énième fois mais cette fois ci il ne reviendra pas... Royal Palois tentera tout de même la Haye Jousselin, le cheval n'est plus là et finira lointain dernier.
Six mois et 5 jockeys différents, le cheval est méconnaissable, à chacun son opinion... Malgré cela un guerrier reste un guerrier, dans le Jean Granel il vient se glisser entre Sable des Ongrais et Zaiyad. Royal Palois is back et il le confirmera dans un William Head de moyenne facture mais en gagnant avec facilité. Après une quantité d'échecs importants , Palou pour les intimes, revient sur Cagnes gagnant d'emblée après 1 an et 8 mois sans avoir gagné le moindre euro. Il fonctionne au moral. L'année suivante est plutôt moyenne, une troisième place sur les haies d'Auteuil en mai. Il revient après des vacances méritées, dans le World Citizen. Une autres victoire sur le steeple d'Auteuil du haut de ses 10 ans, il gagne d'une longueur et demi devant un peloton de jeunots. Malheureusement, une fracture à la clef...
Après tant de belles années offerte à ses copropriétaires, Royal Palois rejoindra le Haras de Grand'Cour ou une retraite méritée l'attend. Une retraite trop courte comme la carrière de son compagnon de toujours, ensemble, ils ont trouvé la lumière. Dans l'au-delà, ils se sont retrouvés dans les vertes pâtures, des pâtures interminables...Là ou le soleil fait briller les herbes, comme les âmes. Ils partirent ensemble vers l'horizon dans une galopade à 4 temps. Et dans Un claquement de sabots aussi régulier qu'infini, ils disparaissent... laissant derrière eux un écho magnifique où s'entremêlent le hennissement de ton champion associé à ton rire à la con..