Pascal Journiac, la discrétion au service de la réussite
Pascal Journiac, de bon matin sur ses pistes d'entraînements du Petit Bonheur, près de l'hippodrome de Durtal
Entraîneur préférant rester à l’ombre des projecteurs, il n’en demeure pas moins que Pascal Journiac est auteur d’un très bon début d’année avec déjà 11 victoires et 38 places pour un peu plus de 80 partants, dont trois acquises en deux jours, les 28 et 29 juin grâce à Voix du Rêve et Gizeux à Lignières-en-Berry ainsi que Mandarin Basc le lendemain à Clairefontaine. Avec un effectif tournant autour de 30-35 chevaux à l’année, l’homme installé au lieu-dit Le Petit Bonheur, à deux pas de l’hippodrome de Durtal, en Anjou, ne truste pas les premières places du classement des entraîneurs mais fait preuve d’une louable régularité au fil des années avec un taux de chevaux classés dans les 5 premiers avoisinant généralement les 60%. Cette réussite est le fruit d’une méthode ayant fait ses preuves, constituée de divers éléments pris chez certains des plus grands professionnels du galop de la région mais également de tout l’Hexagone.
« J’ai tout d’abord effectué mon apprentissage chez Philippe Cottin, dont la femme, Lydie, est la sœur aînée de Philippe Peltier, mon cousin, chez qui j’ai appris les différents rouages de l’entraînement d’un cheval de courses avant d’entrer au service de Gérard Margogne, un homme strict, peu bavard mais formidable homme de cheval. Ensuite, après quelques temps passés chez François Doumen, je suis revenu en Anjou afin d’intégrer l’équipe d’Étienne Leenders avant de passer ma licence d’entraîneur et de me lancer à mon propre compte il y a de cela une vingtaine d’années, en reprenant une ancienne exploitation de trotteurs près de l’hippodrome de Durtal et en y construisant de toutes pièces une structure prête à accueillir des galopeurs ».
Pascal Journiac, entraîneur à cheval tous les matins
Ainsi en 2001, le nom de cet ancien jockey apparaît pour la première fois sur les programmes dans la colonne des entraîneurs, et est alors en charge d’un effectif composé de seize chevaux, dont Rambling Fever, une fille de Be My Chief qui lui a offert sa première victoire en tant que metteur au point, le 03 juin 2001 en plat sur l’hippodrome de Saint-Malo, un mois avant que Jouvence de Guye ne lui offre la première en obstacle, sur le steeple de La Gacilly. Deux juments respectivement montées pour l’occasion par Marie-Bernard Boudaud et Christophe Dubourg, alors à l’époque souvent associés aux pensionnaires d’Étienne Leenders, ancien patron de Pascal Journiac. En effet, de ces expériences passées sont nées des rencontres, devenues, au fil du temps, déterminantes dans la montée en puissance de l’écurie de ce dernier : « L’une de mes plus grandes fiertés à ce jour est de continuer à travailler main dans la main avec des gens passionnés, présents depuis mes débuts en tant qu’entraîneur, qui m’appellent spontanément et viennent d’eux-mêmes à l’écurie pour prendre des nouvelles et observer les progrès de leurs protégés. C’est d’ailleurs l’occasion pour moi de les saluer et de les remercier chaleureusement : Annie Commeau, Jean-Paul Moutafian, Jean-Louis Berger, la famille Landon, Marie-France Suberville, André Martin, Colette & Claude Coué, Philippe Mesmoudi ainsi que tous les autres, qui sont toujours là, malgré les nombreux aléas que l’on peut rencontrer à travailler avec du vivant. C’est un réel plaisir d’être associé et travailler avec des gens qui, sans forcément dépenser de grosses sommes d’argent, parviennent néanmoins à se faire plaisir en voyant leurs pensionnaires en piste et goûter eux-aussi aux joies de la victoire ».
Pas du tout du genre à tirer la couverture à lui, ce natif de Segré conçoit que les bons résultats de ces dernières années sont en partie dûs à sa méthode visant « à entretenir en permanence le moral des chevaux afin qu’ils ne s’installent pas dans une forme de routine qui risque de les dégoûter et à les respecter, dans le but de les faire vieillir le plus longtemps possible » mais également et surtout grâce au dévouement sans faille d’une équipe dont il se dit « très fier », façonnée à son image, qui « travaille dans un esprit familial, mais où chacun sait ce qu’il a à faire et pourquoi il doit le faire ». Un staff mixte composée d’Aurélie Baillif, lauréate des premiers Trophées du Personnel et de l’Élevage en 2016 dans la catégorie cavalier d’entraînement, passionnée par les chevaux depuis sa plus tendre enfance et présente au Petit-Bonheur depuis qu’elle a été « sevrée » comme elle le dit elle-même, il y a vingt ans maintenant. D’ailleurs, sa petite sœur, Justine, est venue la rejoindre et monte, elle aussi, à cheval tous les matins, à l’instar de Dylan Lecomte, Anthony Lechien, Thomas et Thibault, les fils de Pascal, sans oublier le jockey Olivier Jouin, présent lui aussi depuis de nombreuses années et qui vient souvent parachever tout le travail effectué en amont en menant à la victoire les différents protégés de l’écurie, auxquels sont également associés Stéphanie Scieux et Lionel Péan, indissociables au bon fonctionnement de l’établissement. Ainsi, Amijenka et Défi Majeur, lauréats de Quinté +, les bons éléments en cross Ni Plus Ni Moins, Bella Sun, Derby Plus, Butterfly du Mou, et autres Armada et Bayadène, sans oublier Kiwi du Manoir, Mavireenne et Lila, les juments de cœur de Pascal Journiac qui « sans avoir été des championnes, ont fait afficher de bons résultats et eu une belle carrière sportive avant d’entrer à l’élevage comme poulinière ».
Aurélie Baillif, lauréate des Trophées du Personnel et de l'Élevage 2016...
Justine Baillif
Léa, la fille d'Aurélie Baillif, elle aussi tombée dans la potion hippique étant petite !
Anthony Lechien
Dylan Lecomte
Thibault Journiac, le fils aîné de Pascal...
...et son frère, Thomas, aux côtés de son père lors de l'échauffement
Car si l’on connaît bien Pascal Journiac comme entraîneur, on le connaît moins comme éleveur. En effet, le nom de ce dernier ainsi que celui de sa femme, Christelle, apparaissent de plus en plus souvent dans la colonne des éleveurs et connaissent une certaine réussite en 2020. Avec seulement 5 chevaux, ils comptent déjà 4 victoires et 6 places en 14 partants, les deux derniers succès ayant été acquis par Extreme Wind et Voix du Bonheur le 28 juin, respectivement sur les hippodromes de Pontchâteau et de Lignières. « Voix du Bonheur reste invaincue à ce jour en plat, une discipline dans laquelle on me connait moins mais où j’ai eu mes premiers partants en course. Elle est issue de Green Fever, le deuxième produit de Rambling Fever, la jument qui m’a offert mon premier succès en tant qu’entraîneur avant d’intégrer l’élevage. Son premier produit, Speed Fever, le frère de Green Fever par Vertical Speed, était un bon et très attachant cheval malgré son caractère assez émotif, étant lauréat de neuf courses et placé à 27 reprises, notamment en région parisienne. Si le premier produit de Green Fever n’a pas gagné, son deuxième par Irish Wells, Very Speed, a remporté deux courses en cross. Il ressemble comme deux gouttes d’eau à sa sœur, Voix du Bonheur, pour laquelle David Powell et Magalen Bryant m’ont généreusement offert la saillie du père de cette dernière, Boris de Deauville, en échange d’une part dans la pouliche. Deux grands noms de l’obstacle avec qui j’ai vécu de bons moments grâce à Orchid de Chadzeau, issue de la même souche que Rubi Ball, ou encore Marodima et plus récemment Vallee Viva et Derby Plus ».
Une activité qui le passionne depuis toujours et qu'il tient à partager à plusieurs, avec sa famille notamment : « Tout le mérite revient à mes beaux-parents ainsi qu’à mon beau-frère, Éric Prezelin, qui s’occupent au quotidien des juments et des produits sur la commune de Champigné, près du Lion d’Angers. Je ne donne mon avis que sur les choix d’étalons pour les juments. J’aime à choisir des reproducteurs à la fois jeunes et qui se sont montrés « durs » en course, transmettant ce caractère à leurs produits afin qu’ils soient capables de bien encaisser le travail après. Il nous arrive de faire des erreurs ou que les choses ne se passent pas comme prévu une fois les produits à l’entraînement mais cela est inhérent à l’activité d’éleveur. L’élevage, c’est avant tout du rêve, et lorsqu’il devient réalité, c’est tout de même plus sympa de le partager avec des gens que l’on apprécie. Ainsi, avec André Martin et Marie-France Suberville, avec qui je suis associé sur le premier produit de Coudree par American Devil, nommé Anoutroi, nous avons décidé d’envoyer cette dernière à Dabirsim cette saison dans l’optique de répéter le même courant de sang qui a notamment donné Pizzicato, gagnant du Prix Montenica (L.) à Chantilly et de la finale des 3 ans du All-Weather Championship de Lingfield l’an dernier ».
"Tout vient à point à qui sait attendre" dit le proverbe, et cette patience, combinée à beaucoup de travail, de discrétion et de confiance envers les hommes et les femmes participant à cette aventure, semblent être pour beaucoup dans les bons résultats de l'écurie Journiac ces dernières années. La pierre angulaire d'une réussite présente et qui perdurera sans nul doute dans l'avenir.
Retour en images sur une matinée à l'entraînement chez Pascal Journiac