L'histoire de DNA Pedigree: Seabiscuit vs War Admiral, le match du siècle
Seabiscuit devant War Admiral à Pimlico, en 1938
Après moult tergiversations, reports et aléas divers, les entourages des champions Seabiscuit et War Admiral finissent par se mettre d’accord : le match opposant les deux meilleurs performers d’Amérique du Nord aura bien lieu, et ce sera sur les 1900m dirt de l’hippodrome de Pimlico (Baltimore), le 1er Novembre 1938. La course, baptisée Pimlico Special et dont l’édition inaugurale avait été remportée l’année précédente par War Admiral, attirera une foule de 40.000 personnes et sera suivie par plus de quarante millions d’auditeurs à la radio: le match du siècle !
Pour entrer dans l’évènement, présentons les deux protagonistes en commençant par le favori logique, invaincu à 3 ans dont la triple couronne US (Kentucky Derby + Preakness Stakes + Belmont Stakes), fils du légendaire Man O’War auquel on le compare volontiers : le 1937 Horse of the Year, War Admiral. Petit cheval compact faisant souvent des difficultés au départ mais fort prompt à s’élancer pour prendre d’emblée un avantage décisif sur ses adversaires, courageux et doté d’une incroyable volonté de vaincre, War Admiral a accumulé les succès de prestige en prélude à son match contre Seabiscuit, un concurrent qu’il avait bien pris soin d’éviter jusque-là. Il porte les couleurs de son éleveur, Glen Riddle Farm, est entraîné par George Conway et monté par son fidèle partenaire, Charles Kurtsinger.
Face à lui le plus improbable des adversaires : Seabiscuit. Né le 23 mai 1933 à Claiborne Farm (Kentucky) des œuvres de Hard Tack, un fils du champion Man O’War réputé pour son très mauvais caractère, et de la minuscule inédite Swing On (Whisk Broom II), Seabiscuit était à la fois petit (1,57 m), tordu dans ses aplombs, mauvais marcheur, fainéant, gourmand et apathique, préférant amplement vider sa mangeoire et aller se coucher plutôt que de se dépenser inutilement à l’entraînement. Son entraîneur initial, Sunny Jim Fitzsimmons, l’avait envoyé très tôt au combat, sans ménagement, et l’utilisait surtout pour tirer les autres le matin. Logique dans ces conditions qu’il ne perdit sa qualité de maiden qu’après 17 sorties publiques… En tout cas l’animal était solide, avec 35 courses dont 5 modestes victoires durant sa seule saison de 2 ans !
La carrière de Seabiscuit prit un nouveau virage en juin de l’année suivante lorsque l’entraîneur Tom Smith s’en rendit acquéreur pour le compte de Charles S. Howard. $8,000 pour un cheval déjà titulaire de 9 victoires en 47 sorties, mais qui allait progresser grâce aux méthodes atypiques de son nouveau mentor. Les victoires s’accumulent alors sous la monte du canadien Red Pollard, un jockey borgne, fragile et parfois alcoolisé qui savait cependant en tirer le meilleur parti. Plusieurs grandes victoires sur la côte Ouest puis sur la côte Est, souvent sous de très lourdes charges, et Seabiscuit devint le dauphin de War Admiral. Il est fin prêt pour le Match, d’autant que Tom Smith lui a appris à bondir au moindre son de cloche !
Le retour des vainqueurs: Tom Smith, Seabiscuit et George Woolf, le 01/11/1938
Retour à Pimlico pour le match du siècle. La tension est palpable dans des tribunes partagées entre les supporters du champion de la côte Est, War Admiral, représentant l’élite, et ceux d’un Seabiscuit incarnant le rêve américain au sein d’un peuple détruit par la crise de 1929. La cloche retentit, et Seabiscuit prend de suite l’avantage à la surprise générale sous la monte de George Woolf. Il laisse revenir War Admiral à ses côtés dans la ligne d’en face comme Red Pollard lui avait conseillé, laisse Seabiscuit regarder longuement son adversaire dans les yeux, et ouvre les doigts à l’entrée de la ligne droite pour triompher de quatre franches longueurs devant une foule en délire. L’exploit lui vaudra le titre de Horse of the Year en 1938 !
Seabiscuit poursuivit sa carrière jusqu’à une ultime sortie, le Santa Anita Handicap (Gr.1) édition 1940, qu’il remporta devant 78.000 spectateurs. Avec 33 victoires en 89 sorties, plusieurs records de piste et le record de gains de son époque ($437,730), Seabiscuit fut l’incontestable héros de son temps. De nombreux livres et films lui furent consacrés dont « Pur Sang, la Légende de Seabiscuit », nommé pour l’Oscar du meilleur long métrage en 2003.
Seabiscuit entra au haras à Ridgewood Ranch, en Californie du Nord, avec les honneurs, mais s’avéra peu prolifique (108 foals et aucun champion) avant d’être victime d’un infarctus fatal à l’âge de 14 ans. Durant ses sept saisons de reproducteur, 50.000 visiteurs s’étaient déplacés pour le saluer. De son côté, le moins populaire War Admiral deviendra un grand Chef de Race, la revanche de la génétique !