Doha Dream, le 1er qatari pour l'obstacle
On n'avait jamais vraiment vu l'une des écuries de plat les plus prestigieuses du monde, surtout parmi les Cheikhs du Moyen-Orient, lancer sous sa bannière un étalon au profil d'obstacle. Non pas que Doha Dream ait couru à Auteuil bien sûr, mais ce neveu de Martaline, sacré meilleur stayer français de sa génération lors de sa victoire dans le Prix Chaudenay (Gr.2), se dirige évidemment vers une production dans cette discipline. Ce fils de Shamardal a été le tout 1er black-type élevé au Haras de Bouquetot, puisqu'il y a grandi alors que Cheikh Joaan Al Thani venait d'acheter ce domaine en Normandie. A l'époque, il n'y avait pas encore d'étalon à Bouquetot, dont la cour des reproducteurs a été inauguré dès l'année suivante, en 2014, avec Style Vendôme et Planteur. Aujourd'hui, il y 9 étalons dans cette cour, dont la 2ème rangée de boxe a été terminée l'an dernier. De fait, Doha Dream a été placé tout près, au Haras du Hoguenet sous la férule d'Anthony Baudouin, où la culture de la mixité est bien présente notamment grâce à Montmartre.
Doha Dream était dans les flancs de sa mère Crystal Reef quand Nicolas de Watrigant a acquis cette dernière pour 200.000 GNS à Tattersalls en décembre 2012 pour le compte d'Al Shaqab. Elevée par Juddmonte, cette fille de King's Best n'est autre qu'une soeur de la star française Martaline, qui vient de prendre sa retraite, mais aussi de Coastal Path, étalon très confirmé, ainsi que de Reefscape, sujet donc la particularité est d'avoir donné naissance à un seul produit, nommé L'Unique et vainqueur de Gr.1 ! Doha Dream s'inscrit dans la plus parfaite continuité de ses oncles qui ont tous, avant de produire des gagnants de Gr.1 en obstacle, remporté eux-mêmes de grandes épreuves sur plus de 2400 m, respectivement le Prix Maurice de Nieuil (Gr.2), Chaudenay (Gr.2) et du Cadran (Gr.1).
Doha Dream
A 2 ans, placé chez André Fabre, Doha Dream a vite effacé son échec en débutant à Deauville par une 2ème place dans le Prix de la Sorbonne à Longchamp, devancé par une autre "Al Shaqab" qui deviendra célèbre : Qemah. A 3 ans, après 2 victoires au printemps à Fontainebleau et Saint-Cloud, il entame un tour de France des Derbies. Dauphin de la Coupe des 3 ans (Listed) à Lyon, il remporte le Derby de l'Ouest (Listed) à Nantes, puis enchaîne sur le Prix Frédéric de Lagrange (Listed) à Vichy. 3ème du Prix Niel, à moins d'une longueur du japonais Makahiki, il prèfère le Prix Chaudenay à l'Arc de Triomphe, et s'impose logiquement dans ce Gr.2 sur 3000 m. Encore plusieurs fois placé de Groupes à 4 et 5 ans, Doha Dream avait sa place toute trouvée au Haras. Il y a 25 ans, un tel stayer n'aurait intéressé aucun haras normand, et il aurait débuté dans une station des Haras Nationauxr. Mais les temps ont considérablement changé, avec l'avènement du marché de l'obstacle très avide des chevaux de plat de distance que tout le monde s'arrache aujourd'hui en France. On note que l'entourage de Doha Dream a décidé de le lancer à un prix attractif sinon très concurrentiel, à 2500 €.
Doha Dream n'a pas la grosse tête, mais une grosse tête, comme tous les bons produits de son père Shamardal, un cheval à la vie romanesque. Elevé aux Etats-Unis, fils de Giant's Causeway avec une mère par Machiavellian, Shamardal a été racheté foal à Keeneland, et a développé la terrible "maladie de chien" en début d'année de yearling. Cette maladie locomotrice est fatale sauf quelques rares exceptions, dont le célèbre cas d'Anabaa...et donc Shamardal. Estimé souffrant au grade 3, Shamardal a été remboursé par l'assurance et programmé pour l'euthanasie. Mais l'expert de l'assurance, Robert Ketch, par ailleurs adpte des médicines vaudou, a récupéré le poulain pour tenter des nouveaux traitement alternatifs...qui ont réussi ! Le poulain a été présenté à Tattersalls en Angleterre. Là, une endoscopie erronnée l'accuse de souffrir de problème de respiration. Là, il est tout de même acheté par Gainsborough, le haras du défunt Cheikh Maktoum Al Maktoum, pour la somme de 50.000 GNS, un montant faible eu égard à son grand pédigrée "Weinstock", puis il est loué à un ami de la famille, l'homme d'affaire dubaïote Abdulla Buhaleeba, qui le confie à Mark Johnston. Malgré son physique disgracieux, affublé d'une énorme tête busquée, Shamardal devient un champion. Il gagne ses 3 premières courses dans un canter, dont les Dewhurst Stakes (Gr.1), étant revenu entre temps sous la bannière de Gainsborough. A 3 ans, après un échec (le seul de sa carrière) sur le sable de l'UAE Derby, il réussit le doublé Poule d'Essai des Poulains / Jockey-Club avant gagner les St James's Palace Stakes. Ce sera sa dernière course, car il s'est fracturé un boulet en préparant les Eclipse Stakes. Il restera comme le 1e vainqueur du Prix du Jockey-Club sur sa nouvelle distance de 2100 m. Vainqueur de bout en bout comme sait si bien le fairre Frankie Dettori, il a été le 1e de la longue série des milers qui ont tenu la distance une fois dans leur vie pour rempoter un prix du Jockey-Club amputé de 300 m.
Au haras, Shamardal a transmis sa grosse tête mais aussi sa grosse cylindrée. Aujourd'hui "private" à Kildangan Stud à 17 ans, c'est un excellent étalon, père de Lope de Vega qui a pris sa digne succession, réalisant le même doublé Poule d'Essai / Jockey-Club avant de s'installer à Ballylinch Stud. Shamardal est aussi l'auteur de 3 stars à Hong Kong, Able Friend, Dan Excel et Pakistan Star. En France, outre Lope de Vega, il a donné Baltic Baroness (Vermeille), Sagawara (Saint-Alary) et Dariyan (Ganay). Ce dernier est l'un des 5 étalons par Shamardal installés sur le territoire, avec Vidayar, Bow Creek et Sommerabend, le seul à avoir des produits en âge de courir, et qui a remarquablement bien réussi avec sa 1e génération de 2 ans en 2018.