Pastorius : les raisons d'une renaissance programmée
Tout feu, tout flamme, Pastorius fait l'objet d'une renaissance spectaculaire...et quelque part programmée !
La jolie victoire en débutant hier sur les haies de Pau de Jabuse Machine permet de jeter à nouveau la lumière sur le cas de son père Pastorius. La pensionnaire de François Nicolle est en effet devenue le 14e élément issu de sa première génération "FR" à passer le poteau en tête, et ce pour 30 partants. Des statistiques remarquables, auxquelles on peut ajouter que la quasi-totalité des autres partants ont fait l'arrivée, et que parmi ces "maidens", se cache un poulain comme Boléro, 3e du Prix Cambacérès (Gr.1)... Cela doit compter comme une victoire ! Voilà un performer black-type s'ajoutant à Zenta, lauréate d'un Finot, et à la gagnante du Jacques de Vienne (Gr.1 AQ) July Flower.
Jabuse Machine hier lors de son succès sur les haies de Pau (aprh)
Cette renaissance de Pastorius ne s'apparente pas qu'à une percée en obstacle, programmée depuis son arrivée à la Hêtraie en 2018. Il a depuis sailli une jumenterie très majoritairement dans le but de produire des sauteurs, ce qui s'est passé. Le cru 2022 a doublement fait son oeuvre, avec un nouveau départ lié aux "FR" et entamé dès le printemps, mais aussi avec les grandes performances en plat de produits conçus lors de ses premières saisons de monte en Allemagne. On pense à Dalika, qui a gagné 3 Groupes aux Etats-Unis l'an dernier dont les Beverly D Stakes (Gr.1), à Riocorvo (Grand Prix de Vichy Gr.3), Parol (Gr.3 en Allemagne), ou encore Start Me Up (3e Prix d'Aumale Gr.3). Cette dernière, jolie 4e du Boussac et espoir classique en 2023, a toutefois été conçue en France lors de la saison 2019, et illustre une réussite également sûre avec les 2 ans pour Pastorius. Il a eu 5 partants de cette jeune génération, pour 3 vainqueurs et un 2e de maiden en région parisienne.
Appartenant à Antoine Griezmann et entraînée par Philippe Decouz, Start Me Up sera un espoir classique pour Pastorius en 2023 (aprh)
Voilà qui souligne une réussite impressionnante pour Pastorius, dont les clés du succès ne sont pas cachées entre les lignes. Parlons déjà du cheval de course, qui a été d'un très haut niveau. Ses deux plus grandes performances sont sa victoire à 3 ans dans le Derby Allemand, et celle dans le Prix Ganay à 4 ans, deux courses qui ont un passé fort avec la discipline de l'obstacle (sans toutefois ne pas sortir de bons étalons de plat). Lando, Lavirco, Samum, Kamsin, Shirocco ou encore Sea The Moon sont au palmarès, et ont fait de bons pères de sauteurs. Quant au Prix Ganay, son podium révèle quelques uns des ténors de la discipline de ces dernières années : Cadoudal, Doctor Dino, Mansonnien, et autres Dream Well, Vision d'Etat, Maxios, Pistolet Bleu... Participer à l'arrivée de cette course donne en effet des indications sur le potentiel reproducteur d'un cheval : sur 2000m, il faut un alliage de tenue et de vitesse naturelle représentant les codes de l'obstacle moderne. D'ailleurs, le Ganay est souvent un vivier d'étalons mixtes, soulignant le paramètre précédemment évoqué. Pour le reste, il faut apporter l'aptitude à l'obstacle... ou pas ! Après tout, un cheval qui a de la tenue dans les gènes suffit, puisqu'un sauteur est avant tout un cheval dressé et fabriqué pour la chose avant d'être un simple prototype pour l'obstacle dans sa génétique.
Pastorius après sa victoire dans le Ganay avec Olivier Peslier (aprh)
Les raisons du succès se cachent évidemment aussi dans le pedigree de Pastorius. Il est issu d'une famille très solide, avec des performers en obstacle à haut niveau comme les gagnants de Gr.1 Labaik et Adagio. Pastorius est un fils du remarquable Soldier Hollow, dont beaucoup de rejetons sont aujourd'hui utilisés pour l'obstacle, et qui a lui-même donné des gagnants de Gr.1 dans la discipline. L'un de ses meilleurs produits du genre, Saldier, double lauréat de Gr.1 en haies, est issu du même croisement Soldier Hollow/Monsun que Pastorius. Grand-père de Pastorius, mais aussi connu comme géniteur d'Adlerflug, le minuscule In The Wings a lui-même connu beaucoup de réussite avec ses sauteurs, malgré une production "fabriquée" pour le plat. Il a donné 4 gagnants de Gr.1 en obstacle, et est le père d'un étalon confirmé comme Winged Love, ou encore du méconnu Fracas. Ce dernier a brillé à Auteuil en 2022 grâce à son fils Mctigue, tombeur de St Donats dans le Georges de Talhouet-Roy (Gr.2).
Père de Soldier Hollow et Adlerflug, In The Wings a une affinité particulière avec l'obstacle
En tant que père de mères chez les sauteurs, In The Wings s'est aussi bien illustré... en croisant avec le sang de Monsun ! 4 de ses 6 meilleurs performers en obstacle comme père de mères sont issus de Monsun ou de ses fils (Getaway, Maxios, Shirocco). Il y a donc une affinité toute particulière entre In The Wings et le chef de race allemand. Pour autant, la réussite en plat de Pastorius s'explique aussi par le fait que malgré ses croisements propices à l'obstacle, il ne dénature pas la vitesse naturelle d'une famille. La bonne 2 ans Start Me Up et le miler lauréat de Groupe en 2022 Parol sont tous deux issus du croisement entre Pastorius et une mère par Big Shuffle, un grand vecteur de vitesse. Leurs souches maternelles axées sur la vitesse et le plat ne sont pas tombées dans l'obstacle par défaut en allant à Pastorius. Un exemple concret est la mère de Start Me Up, qui a eu 4 partants avec Pastorius, pour 3 vainqueurs à 2 ans dont 2 black-types sur le mile.
Tout ceci reste de la statistique et parfois de la théorie, ce qui n'est pas toujours un gage de réussite pour un étalon, qui a tout pour réussir sur le papier mais ne perce pas. Il faut aussi cette part de chance et de magie qui rend un cheval bon dans sa nouvelle vie, et parfois cela ne s'explique pas ! Pastorius semble en tout cas naviguer sous une bonne étoile, et devrait être très actif en 2023 à la faveur de cette renaissance... programmée certes, mais réalisée, et c'est l'important !
Pastorius devrait être très actif en 2023 à la Hêtraie
