1er partant dans l'Arc pour Michel Monfort, la Bretagne face aux superpuissances

01/10/2020 - Actualités
Moins de 10 ans après l'explosion de son champion Dabirsim, Michel Monfort s'apprête à vivre un nouveau moment fort dans sa carrière d'éleveur, avec la participation de Gold Trip à l'Arc de Triomphe. Rencontre avec l'homme du Haras de Treli à Quimperlé en Bretagne, qui avec une quinzaine de juments a réalisé le rêve de chaque passionné de course...

Michel Monfort, un breton au départ de son 1er Arc de Triomphe comme éleveur

 

Il est éleveur de chevaux de plat en Bretagne, ce qui pour n'importe quelle néophyte ne serait pas une évidence. Pourtant, Michel Monfort a réalisé ce que peu ont réussi en élevage : élever un gagnant de Gr.1. Au début des années 2010, c'est son élève Dabirsim qui a été le meilleur 2 ans de sa génération, enlevant le Morny et le Jean-Luc Lagardère. C'était la consécration pour Michel Monfort, frère de l'entraîneur Patrick Monfort, qui après avoir monté en gentleman étant jeune, avait laissé de côté les courses pendant bien longtemps. Il s'était reconcentré par la suite sur l'élevage à Quimperlé dans le Finistère, en visant d'emblée le haut de gamme. La mère de Dabirsim, il l'avait achetée aux Etats-Unis, alors pleine du champion. Car oui, le crédo de Michel Monfort c'est "acheter des soeurs de gagnantes de Gr.1 ou de juments black-types ayant performé dans les Gr.1". Une sélection se fait vite dans ces cas-là... Aujourd'hui, le Haras de Treli de Michel Monfort va vivre un autre moment fort. Gold Trip, né à Quimperlé, gagnant de Gr.2 et 3e du Grand Prix de Paris, va s'aligner dans l'Arc de Triomphe. 

 

Dabirsim, le premier champion "Made in Treli", double gagnant de Gr.1 à 2 ans (APRH)

 

" Je ne suis pas très stressé, nous confie Michel Monfort. L'Arc est toujours une course particulière, mais curieusement je ne la mets pas au dessus des autres... Dimanche je serais à la maison, et je prends autant de plaisir à regarder mes chevaux en famille tranquillement installé devant ma télévision. La dernière fois que je suis allé aux courses pour un Gr.1, c'était dans la Poule d'Essai de Dabirsim, et cela ne s'est pas bien passé... Je ne suis pas superstitieux mais bon !... C'est surtout très palpitant de courir l'Arc avec un 3 ans, encore plus qu'avec un vieux cheval, cela veut dire beaucoup plus pour un éleveur. Gold Trip a toujours été estimé, et j'avais l'occasion d'avoir de ses nouvelles car j'avais un cheval en pension chez Fabrice Chappet. Tout a été bien réglé, il a mis longtemps à trouver sa course en affrontant de bons chevaux, mais a fini par montrer sa qualité dans le Greffulhe. Dans le Jockey-Club il n'a pas eu la chance de s'exprimer, même le jockey a reconnu son erreur de parcours. Ca arrive. Dans le Grand Prix de Paris on a vu le vrai Gold Trip, contre un vrai lot. Il a quand même battu le gagnant du Derby d'Epsom. "

 

Gold Trip lors de sa victoire dans le prix Greffulhe. Il s'alignera dimanche dans l'Arc avec son fidèle Stéphane Pasquier. (APRH)

 

Gold Trip est issue de Sarvana, une jument de souche Aga Khan, soeur de la multiple placée de Gr.1 Sarkiyla, achetée seulement 23 000 € par Michel Monfort. Pour Gold Trip, il est allé en Angleterre à Dalham Hall Stud à Outstrip, un très bon cheval et étalon tout à fait correct, qui est peu connu en France: " J'ai une quinzaine de poulinières, et un 1/3 de la jumenterie va saillir à l'étranger. Cela fait une douzaine de yearlings par an. En France nous avons des bons étalons, mais ils sont souvent chers, et à l'étranger, il y a énormément d'opportunités pour les éleveurs. Il faudrait rétablir le pourcentage éleveur entre les conçus en France et à l'Etranger. Le protectionnisme est réducteur. Les soeurs de Gold Trip portent la casaque maison. Par principe, tous mes yearlings sont à vendre, mais on ne va pas les donner non plus. On a exploité plus par défaut au début, mais cela s'avère payant, avec des bons résultats, et du black-type à la clé, comme pour Got Wind, la soeur de Gold Trip. Gold Trip fait partie de la dernière génération élevée sous mon nom. Depuis, on a structuré le Haras en société avec mes fils, sous le nom de Haras de Treli. "

 

Michel Monfort et son fils Maxime autour du ring d'ARQANA, où il a acheté Sarvana, la mère de Gold Trip (APRH)

 

Fait incroyable, Gold Trip est le seul "FR" attendu au départ de la course avec Sottsass (Ecurie des Monceaux). Exploit ou sélection ? Michel Monfort dresse un constat alarmiste: " On le voit chaque année, les anglais viennent nous battre chez nous avec facilité. Il y a globalement une grosse baisse de la compétitivité des chevaux français, et forcément cela se voit à haut niveau. Il y a un déficit de nombre et de qualité, et pourtant nos entraîneurs savent faire... Bizarrement, tout le monde semble ne pas s'en rendre compte que maintenant, mais cela fait bien longtemps que le niveau baisse. Il va falloir booster notre production française".

Michel Monfort réalise donc une performance en soi en s'alignant au départ de l'Arc en tant qu'éleveur, qui plus est avec un entraîneur français: " Par principe, mes chevaux sont à vendre aux plus offrants, mais quand les chevaux restent en France, c'est la cerise sur le gâteau. J'ai d'ailleurs eu beaucoup plus de réussite en France qu'à l'étranger, car les entraineurs attendent plus les chevaux. "

Comme on le disait au début, pour quelqu'un qui découvre les courses, l'idéal de l'élevage reste la Normandie, et pourtant God Trip sort du Finistère: " Il n'y a pas de fierté bretonne ou quoi que ce soit (Rires), on peut élever des bons chevaux partout, tant que le travail est bien fait. En bretagne nous avons un climat très intéressant pour élever, qui est plus clément l'hiver et moins assommant l'été. Les terres sont très bonnes, et il n'y a pas de risques de surpaturations. ll y a 50 ans, on ne voyait que par la Normandie, mais cela a changé. Alors oui, cela me fait faire du trajet pour les saillies, de longues journées, mais au final, on en a été bien récompensé ! ".

Dimanche, le breton Gold Trip lèvera haut les couleurs de la famille Monfort dans l'Arc de Triomphe, une réussite incroyable pour le Haras de Treli, qui n'est pas dû au hasard, mais bien aux investissements et au travail, et à la petite chance que chaque grand éleveur doit avoir...

 

La Bretagne face aux superpuissances de l'élevage mondial ? Ca a déjà fonctionné...(APRH)

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