Christopher Head : "Sibila Spain nous rend meilleurs"

Christopher Head vit un rêve éveillé avec Sibila Spain, l'occasion de mettre en avant un jeune professionnel à la belle réussite (APRH)

" Cela fait 5 générations que les Head sont dans les courses. J'ai fait des études car mon père voulait que j'ai un métier stable... Je l'ai compris, mais il est très difficile d'échapper à la passion des chevaux. Dès lors, être entraîneur a été une évidence." Christopher Head, qui comme vous l'aurez compris est le fils de Freddy, s'est construit un parcours au millimètre pour arriver aujourd'hui avec un premier espoir classique : Sibila Spain. Cette pouliche invaincue en 2 sorties appartenant à la Yeguada Centurion (Leopoldo Fernandez Pujals) est la première à faire rêver en grand ce jeune mentor, et son équipe : " Sibila Spain est arrivée dans mon écurie début février après un appel de Leopoldo Fernandez Pujals. Nous avions parlé il y a 2 ans de travailler ensemble. La pouliche a passé son hiver chez Alban Chevalier du Fau, qui l'a d'ailleurs amenée dans un superbe état. Nous l'avons assez travaillée à la piste pour qu'elle puisse ensuite aller au gazon avec mes autres 3 ans. Un jour, elle a galopé de belle manière avec une bonne pouliche de mon père. On a fait le pari fou de viser le Diane avec elle. Cela paraissait osé à l'époque, mais elle partageait des points communs avec des pouliches de qualité que j'avais cotoyés par le passé chez mon père et ma tante."

Sibila Spain, impressionnante lors de ses débuts à Saint Cloud (APRH)

Bien loin d'être des faux-semblants, ces atavismes se sont pleinement révélés sur la piste. Sibila Spain a écrasé un bon lot d'inédites à Saint-Cloud, avant de se balader à Lyon... La suite est déjà dessinée: " Son objectif est le prix de Diane. Nous pensions à priori passer par une listed, mais avec la refonte du programme, le prix Saint Alary se pose à un mois du Diane, et n'apparaît plus comme un "faux Gr.1". Je pense maintenant connaître assez bien la pouliche pour la préparer pour cet objectif. Sibila Spain nous rend meilleurs, elle nous permet d'avoir une chance d'aller au-delà des objectifs que nous nous étions fixés cette année à l'écurie. On a de la pression, mais une bonne pression, et toute l'équipe a su s'adapter au travail avec Sibila Spain, qui a l'avantage d'avoir des objectifs fixés, ce n'est plus le même travail dès lors. En tout cas, tout ceci est très excitant, et c'est une chance pour l'écurie."

La team Christopher Head fait la part belle à la jeunesse, avec ici le jeune Thibault Cousin qui tient Sibila Spain, lui qui avait été de la partie aux Trophées du Personnel 2019 (APRH)

Ainsi, Christopher Head touche enfin du bout des doigts le cheval attendu par tous, et ce après s'être installé seulement en 2018: " J'ai commencé à travailler pour mon père à l'âge de 20 ans. Il m'a accueilli dans son équipe, et j'ai eu la chance d'exercer la plupart des postes indispensables au bon fonctionnement d'une écurie. J'ai pu côtoyer les Goldikova, Charm Spirit, Marchand d'Or, Solow... Cela a continué quand je suis devenu assistant chez Criquette durant 3 ans. C'était l'époque de Trêve et National Defense. Il était important pour moi de pouvoir compléter mon parcours avec une expérience dans l’obstacle. J’ai eu la chance de pouvoir la réaliser auprès de Guillaume Macaire, qui m’a permis de pouvoir sortir du cadre familial et m’a apporté la façon de penser qui a été l’ingrédient principal de son succès pendant toutes ces années." Christopher ne tarit d'ailleurs pas d'éloges au sujet du maître de l'obstacle, qui lui a évidemment beaucoup appris: "Guillaume Macaire est un autodidacte fantastique. Il s’est créé seul et je souhaite l’imiter. Je suis reconnaissant d’avoir pu être dans son entourage car son perfectionnisme et sa rigueur sont des qualités, selon moi, indispensables pour un entraîneur de chevaux de courses. Guillaume Macaire a réinventé la façon d’entraîner dans l’obstacle et continue de marquer son temps à la manière de Caravage dans l’art. Il s’agissait de se rapprocher de son courant de pensées afin d'aborder l’entraînement avec un œil neuf, loin de ce que j'avais pu voir pendant mon apprentissage".

La période Macaire a été très importante pour Christopher Head (APRH)

Ensuite, Christopher Head a pu s'installer, et a choisi Chantilly: " Chantilly fait toujours rêver les propriétaires. On a tout de même un outil incroyable, et la proximité de l'hippodrome. J'avais bien préparé mon installation, en prenant le temps d'avoir le bagage nécessaire pour mettre mes clients en confiance. J'ai une équipe jeune, qui apporte une certaine modernité à l'écurie. C'est très important. Je voulais surtout pouvoir gérer l'augmentation d'effectif, en construisant d'abord les débuts avec des gens de confiance. Aujourd'hui, c'est le cas, avec notamment Jonathan Lobel, un ancien cavalier de chez mon père qui est aussi allé en Australie. C'était le parfait second d'écurie pour pouvoir construire cette équipe de jeunes passionnés. Je travaille avec Baker McVeigh à Chantilly côté vétérinaire, et d'excellents maréchaux, qui sont très professionnels, et une partie intégrante de la réussite de l'écurie. Dès le début, Christophe Brun et l'écurie Normandy Spirit nous ont fait confiance, et peu à peu de nouveaux propriétaires les ont rejoints. Je travaille beaucoup avec Gérard Larrieu, qui a un oeil aguerri, et qui rassure les clients. Ce triangle entraîneur/courtier/propriétaire est un vrai plus. J'essaye vraiment de créer une nouvelle clientèle, de m'affranchir un peu de mon cercle familial. Cela se passe bien, puisque l'écurie grandit peu à peu, avec de nouveaux propriétaires passionnés, avec lesquels nous avons une superbe relation. Cela me semblait primordial pour avancer avec une certaine sûreté, sans aller trop vite. Le côté gestion d'entreprise est primordial aujourd'hui, et j'ai un plan assez précis pour l'avenir de l'écurie. L'objectif à court terme est d'acheter notre propre écurie. Je pensais que cela arriverait un peu plus tard, mais Sibila Spain nous ouvre des portes (rires) ! Beaucoup de gens me disaient que je faisais trop de plans sur la comète mais je suis comme ça. J'ai besoin de préparer les choses pour me sentir à l'aise."

Christopher Head travaille beaucoup avec Gérard Larrieu (APRH)

Pour faire ses preuves dans les rangs des entraîneurs, Christopher Head a dû quelque peu s'affranchir de son nom, tout en gardant une relation particulière avec son père Freddy: " Mon père a été un crack jockey et est un très bon entraîneur, dont je suis d'ailleurs le plus grand fan. Quand je me suis installé, lui et Criquette sont restés en marge de mon entraînement, tout en étant disponible pour des conseils. Evidemment, Freddy est une source d'inspiration, et mon objectif est d'être à la hauteur de cet héritage. Il y a une pression qui est saine, et rien ne me ferait plus plaisir que de le rendre fier. Après tout, tous les enfants veulent rendre fiers leurs parents, non ? Il était clair que débuter en tant qu'entraîneur avec le désir de créer une nouvelle clientèle n'allait pas être le chemin le plus facile, mais les plus grands destins ont commencé de cette manière, et je souhaitais m'en inspirer à mes débuts, me faire mon propre nom, sans que l'on puisse dire que si je réussissais c'était grâce à mon père, mais que les erreurs étaient ma responsabilité."

Christopher et Freddy Head aux ventes ARQANA (APRH)

Ceci, Christopher Head a réussi à le faire, en montant peu à peu les échelons. L'année 2020 a été prolifique, avec 7 succès en 40 courses dont les 2 gros handicaps de Reux, et ceux de Deacon, qui a ensuite permis à l'entraîneur de participer à son premier groupe dans le Grand Prix de Deauville. Sibila Spain confirme cette ascension: " Le point le plus important a toujours été de ne pas passer à côté d’un bon élément s’il venait à nous être confié, il ne faut pas grand-chose pour passer à côté. Nous étions préparés à saisir l’opportunité à tout moment même si cela devait arriver les premières années. L’équipe déjà présente est assez consolidée pour entraîner un plus grand effectif et accompagner l’évolution de l’écurie pour les prochaines années. L’objectif est de fédérer des personnes autour des valeurs de l’écurie. Il faut oujours privilégier la qualité à la quantité dans tous les domaines liés à l’écurie et tacher de gagner la confiance d’un élevage de renom."

Le sympathique Deacon a permis à l'écurie de courir son premier groupe en 2020 (APRH)

 Très attaché à la communication et à l'image de son écurie, Christopher Head voit également d'un bon oeil le développement du marché online, qui s'est accéléré avec la pandémie: "Je suis très optimiste quant à ces évolutions. La filière est à un tournant en termes de communication et de visibilité pour l’extérieur. Beaucoup de choses se sont modernisées dans le bon sens de mon point de vue et les nouveaux outils digitaux à notre disposition tels que Horsiz, IWantTheWinner, Auctav mais aussi Racing Manager sont la preuve que la filière souhaite vivre avec son temps tout en préservant l’héritage culturel. Les récentes décisions prises afin de protéger le sens éthique des courses prouvent que les courses ont encore de belles années devant elles."

C'est donc un entraîneur optimiste qui aborde la suite sereinement. La "dynastie Head" a encore de beaux jours devant elle, et Christopher n'en oublie pas l'élevage, qui est une partie intégrante de la famille: "Je suis en marge de l’activité familiale qui est déjà entre de bonnes mains. Le moment venu je m’investirai dans l’élevage familial mais j’ai encore beaucoup de choses à accomplir avant d’en arriver là. Tout en profitant d'un accès privilégié pour les chevaux de nos clients."

Comme vous le constatez, le chemin est bien tracé pour l'écurie Christopher Head, et les plans sur la comète se traduisent à ce jour de la meilleure des manières...Pourvu que ça dure, et que Sibila Spain continue son ascension dans le St Alary, car quel que soit son nom ou son parcours, voir un nouveau venu briller dans les classiques serait une bonne nouvelle, et un message fort pour tous ceux qui veulent réussir dans ce métier. 

D'un simple rêve à la réalité de la piste, Christopher Head trace pour l'instant un parcours quasi sans faute (APRH)