L'hippodrome du mois avec la FNCH : Marseille-Borély
En route vers la cité phocéenne à la découverte des hippodromes de Marseille, Borély et Vivaux, ainsi que du centre d’entraînement de Calas comptant plus d’une vingtaine d’entraîneurs, administré dans sa totalité par la Société Hippique de Marseille. Rencontre avec Serge TARDY, fraichement élu à la présidence, cet entrepreneur énergique et passionné, nous présente ses ambitions pour continuer de faire briller les courses hippiques dans la région du Sud-Est.
- Président, vous avez été récemment élu à la tête de la Société Hippique de Marseille, vous assurez également la présidence du syndicat national des propriétaires au galop, quel est votre parcours au sein de la filière hippique ?
Celui d’un passionné, qui progressivement, en parallèle à une activité professionnelle dans le secteur de l’énergie et de l’habitat collectif ô combien éloignée du monde hippique, essaye de contribuer à faire vivre notre activité. Depuis mon plus jeune âge, les courses font partie de mon paysage. Mon père, gentleman rider, m’a naturellement fait découvrir cet univers. Les courses concentrent le sport de haut niveau, la magie du cheval, la beauté des lieux, l’élégance, le rêve, et j’ai été conquis.
Rapidement jeune propriétaire, puis administrateur dans diverses sociétés de courses, membre d’associations de propriétaires, j’ai ainsi découvert de nombreux rouages de l’institution, ce qui me paraît bien utile pour appréhender dans leur globalité les sujets majeurs de notre écosystème avec références et expériences. Nous avons collectivement la responsabilité de faire vivre et de développer cet univers sportif et économique qui existe et perdure depuis presque deux siècles, et j’essaie d’y contribuer en y mettant toute mon énergie et mon enthousiasme.
- Début 2022, la municipalité a renouvelé le bail de l’hippodrome de Borély pour une durée de 3 ans, est-ce un soulagement ? Quels sont vos arguments pour convaincre la Ville de Marseille de conserver cette activité sur le site ?
Quand nous avons pris les rênes en fin d’année 2021, rien n’était acquis. Nous nous sommes battus et ce prolongement pour 3 ans est un premier pas. Nous devons mettre toute notre énergie désormais pour garantir une pérennité beaucoup plus longue. Au cœur de la région du Sud-Est, Marseille Borély est la locomotive de tout l’activité hippique, contributrices de recettes budgétaires élevées, pourvoyeuses d’emplois et protectrices des poumons verts au cœur de la ville.
Borély est la clef de voute du système, c’est le seul pôle national central du Sud-Est, qui par sa localisation et le profil de pistes permet aux professionnels de préparer les meilleures compétitions tant au Trot qu’au Galop. Il justifie à lui seul toute la logistique implantée par et pour les professionnels, le centre d’entraînement de Calas, le centre de formation de l’AFASEC… Moins de professionnels c’est moins de chevaux et donc une activité sportive et économique affaiblie, ce qui serait le déclin non seulement pour Marseille mais aussi pour tous les autres hippodromes de la région.
La ville, le département, la région, commencent à entendre notre discours et nos arguments qui sont forts. Nous devons maintenant réfléchir tous ensemble, nous inclure dans les schémas directeurs à 15 ou 30 ans, avec pour réflexion non pas : Marseille Borély, oui ou non, mais Marseille Borély, oui et comment. Tous les signaux que l’institution peut donner pour rassurer les collectivités sur le rôle majeur de Marseille et sa région sont et seront déterminants.
- Autant pour le centre d’entraînement que pour les deux hippodromes, quelles mesures avez-vous mis en place cet été pour gérer les épisodes de canicule ? Avez-vous été confronté à des restrictions ou limitations concernant l’usage de l’eau ?
Contrairement à ce que l’on pourrait intuitivement supposer, la Provence n’est pas en manque d’eau chronique en été, grâce aux différents ouvrages et réseaux d’irrigation, souvent centenaires, qui ont conduit, au fil du temps, à la formation de la Société du Canal de Provence ou au Canal de Marseille. Cet été particulièrement sec et chaud a toutefois amené le Préfet à prendre des mesures de restrictions de l’usage de l’eau en interdisant l’arrosage en journée, sans grande incidence sur notre fonctionnement habituel qui privilégie l’arrosage de nuit.
Concernant les deux hippodromes, nous n’avons pas de courses sur cette période, ce qui limite les impératifs d’arrosage par rapport à des dates de courses. La piste en herbe de Borély était la plus directement concernée et les équipes de terrain ont su la maintenir en état, malgré les attaques de champignons favorisées par la chaleur humide, pour la reprise début septembre. Ce sont peut-être les pistes de trot qui posent le plus de problème en période de fortes chaleurs car elles demandent un arrosage important avant et pendant les courses, donc en journée.
A Calas, l’activité d’entraînement s’est poursuivie, avec une ouverture des pistes très tôt pour éviter au mieux les fortes températures : à 10h00, 80% des chevaux étaient déjà sortis. Les pistes en sable et les allées cavalières ont été arrosées toutes les nuits, comme tous les ans. Il est certain que l’évolution du climat doit nous amener à adapter nos méthodes de travail et à trouver des solutions, tant pour les courses que pour l’entraînement, pour améliorer le bien-être animal et humain.
- C’est de notoriété publique, Marseille est une ville qui respire le football mais quelle place occupe les courses hippiques dans la vie des Phocéens ?
Il est aussi de notoriété publique que la région marseillaise est parmi les plus « parieuses » de France et à ce titre contribue à la dynamique de notre institution.
Nous avons la chance d’avoir deux hippodromes urbains. Nous rencontrons depuis quelques mois un nombre étonnant de personnes qui nous disent être venues il y a très longtemps avec leurs grands-parents…. Mais plus depuis ! Nous avons perdu une génération, mais cela est, je crois, le cas dans beaucoup d’endroits de France du fait de choix programmatiques. Charge à nous de proposer des émotions sur nos hippodromes et les Marseillais sont prêts à revenir, anciennes et nouvelles générations.
Sur ce point nous avons de nombreuses idées, très novatrices et j’espère que nous pourrons les concrétiser avant l’été 2023, pour autant que le calendrier des courses intègre la nécessité de courir à jours fixes, heures fixes et sur des créneaux attractifs.
- Quels sont les rendez-vous à ne pas manquer sur les hippodromes de Marseille ? Prochainement vous organisez la 13ème étape du Défi du Galop (Listed) est-ce un événement majeur ?
Nous disposons de quelques beaux rendez-vous sportifs, avec un Quinté, deux étapes du Défi du Galop, et quelques réunions de sélection et préparatoires. La journée du Grand prix de Marseille, seul jour de course de l’année un dimanche, en sera le point d’orgue.
Nous allons essayer de la mettre en scène avec une promesse forte auprès du public. Nous analyserons ensuite ce qui a bien ou moins bien fonctionné pour en tirer des leçons pour le futur.
- Pouvez-vous nous parler de vos animations les « Estivales » hippiques de Marseille ? Quel bilan tirez-vous de ses premières éditions ?
Le concept est bon, il avait été créé il y a longtemps déjà et il bénéficie d’une forme de récurrence sur des créneaux porteurs : la notion de rendez-vous à jour fixe, en soirée, en début de week-end, permet de mieux communiquer. C’est déjà une performance d’avoir pu relancer ce projet après deux ans d’arrêt à cause du Covid et en quelques mois après l’arrivée de notre nouvelle équipe.
Chaque journée a été en progression. Le public était ravi avec un contenu plus festif que le standard habituel. La présence récente de nos grands écrans face aux tribunes apporte un réel intérêt, et sur le sujet de la captation d’un nouveau public, qui est important, nous avons noté la présence spontanée d’influenceurs sur les réseaux sociaux qui sont venus et ont relayé positivement, ce qui s’est traduit par la venue de spectateurs au profil réellement nouveau. Nous allons pouvoir bâtir sur cette expérience 2022 et enrichir le contenu pour le rendre plus décisif en 2023.
- Le Pari Mutuel Hippodrome est fréquemment déficitaire pour une société de courses, votre récente initiative « Ticket Gold » ambitionne d’inverser cette tendance, pouvez-vous nous expliquer le concept ? Est-ce que les premiers résultats sont prometteurs ?
Nous partons du principe que l’émotion est l’élément fidélisant d’un spectateur sur l’hippodrome. Le sport, le jeu, l’ambiance, sont les trois axes sur lesquels nous devons travailler. Mais le plus fort effet fidélisant paraît être les paris hippiques et le rêve de gagner.
- Un slogan : « sur l’hippodrome, gagnez plus et plus souvent ».
- Un service « augmenté » : Les Tickets Gold s’inscrivent dans une offre globale qui comprend de l’information spécifique hippodrome, de l’accompagnement par les équipes PMU et la possibilité via les Tickets Gold de multiplier sa mise par 50, 100 ou parfois 200, par attribution aléatoire à un parieur et un seul par course.
Ce qui veut dire qu’avec un peu de chance un néophyte ou un expert, peut en misant 2 euros, faire un pari de 100 à 400 euros et repartir en cas de réussite avec plusieurs centaines voire milliers d’euros. Il faut que nous scénarisions encore davantage l’attribution et l’émotion, mais déjà les gens ont clairement identifié ce rêve potentiel et sont en demande quand il n’est pas au programme. Ce concept, comme d’autres, peut créer de l’affluence sur les hippodromes si les gens sont sensibilisés. La promesse de ticket gold doit générer un pari plus fréquent de la part des spectateurs et ainsi soutenir notre recette. Nous travaillons en ce sens.
- Vous avez mis l’accent sur les activités commerciales et plus précisément sur la location de vos espaces, enregistrez-vous de nombreuses demandes ? Est-ce que cela représente une part fondamentale de vos recettes ?
La location des espaces est devenu un axe majeur à plus d’un titre. Financièrement cela représente un renfort important dont nous avons besoin pour notre santé financière, au même titre que le sponsoring, les partenariats ou la publicité. Au-delà, c’est un formidable moyen de faire découvrir nos sites à des personnes qui sont potentiellement nos futurs clients, tant comme spectateurs que comme futurs investisseurs dans la filière.
Depuis plusieurs mois, nous parvenons à développer un lien croissant avec les entreprises, qui représentent désormais plus de 80% de notre chiffre d’affaires. L’exercice 2022 pourrait, si la tendance actuelle se confirme, avoisiner le double du chiffre d’affaires de 2021 et se compter en quelques centaines de milliers d’euros. C’est une progression très satisfaisante et rassurante pour les personnes qui s’investissent au quotidien dans cette action au niveau commercial comme au niveau technique.
Sous l’impulsion de notre nouvelle équipe, se développent maintenant sur l’hippodrome de Borely de nombreuses actions qui rejaillissent positivement pour Marseille. Dans des domaines aussi divers que des tournages cinématographiques ou publicitaires, des projets pédagogiques avec les établissements scolaires, des manifestations de bienveillance avec des pôles de santé, des opérations associatives caritatives, nous voyons s’installer une dynamique très bénéfique pour l’ensemble du tissu social et économique de Marseille et sa région.
Le challenge va être de continuer à croitre de façon régulière et pérenne. Cela suppose des investissements réguliers pour monter les standards d’accueil et une adaptation de nos méthodes.
- Vous avez intensifié votre présence sur les réseaux sociaux et proposez désormais une nouvelle série vidéo intitulée « les confidences des entraîneurs », votre ambition est de renforcer les liens avec les turfistes ?
Nous sommes dans l’obligation d’être présents sur les réseaux sociaux, au risque de ne pas exister aux yeux d’une certaine catégorie de la population. Il faut trouver la bonne méthode pour être attractif. Le volet « pari » ne doit pas être le seul à apparaitre, il serait trop réducteur, bien qu’il soit le levier le plus fort actuellement pour faire rêver. Nous évoluons régulièrement dans nos contenus, pour trouver la meilleure formule.
Pour la rubrique « confidences » il ne s’agit pas de pronostics, mais bien de confidences d’entraineurs. Tout ce qui peut-être imaginé pour tisser un lien fort avec le turfiste doit être tenté. La personnalisation des professionnels est un élément important, qui donne du crédit au contenu et c’est avec plaisir que nous voyons leur participation à cette démarche. Au demeurant, cela fait plusieurs journées où les « confidences » se révèlent très pertinentes. Cela commence à se savoir…
Nous sommes tous engagés, société organisatrice et socioprofessionnels, pour réussir à créer une nouvelle dynamique, renouveler l’image des courses et booster notre activité.
- Quels sont les futurs projets d’aménagements ou de rénovations de la société hippique de Marseille ?
Idéalement, nous aimerions monter en gamme sur toutes nos activités : matériel technique pour le travail des équipes sur les pistes, rénovation de la PSF de Pont-de-Vivaux, maintien de notre haut niveau de qualité des pistes de Trot et de Galop, hausse des standards d’accueil du public à Borély et Vivaux, création d’une couverture partielle de protection des pistes du centre d’entraînement de Calas avec éclairage et brumisation, alimenté par une couverture photovoltaïque, etc…
Certains projets pourront voir le jour rapidement et d’autres ultérieurement, selon les articulations financières. Quoi qu’il en soit, nous devons le meilleur service aux professionnels et le meilleur accueil au public et aux socioprofessionnels.
- Votre meilleur souvenir hippique ?
Depuis tout jeune, il y en a beaucoup ! En tant que propriétaire, j’hésite entre la première victoire de mes couleurs, toujours émouvante, et la belle aventure de la « Team Calas » avec en point d’orgue une victoire en groupe III à Deauville (Rock Boy) cette année.
En ce qui concerne l’organisation des courses, certainement le partenariat organisé avec l’assistance publique des Hôpitaux de Marseille, qui nous a valu une lettre de remerciements du Président de la région Sud et nous a surtout permis de faire de belles et bienveillantes rencontres.
- Le mot de la fin ?
Espoir !