Reglis Brunel : La Coiffe des gueules cassées
Tout est un peu cassé dans cet homme, ancien jockey d'obstacle, cinquantenaire tous les jours à cheval face aux embruns de la Manche à Dragey. Tout sauf le talent et l'envie. Il rappelle ses étonnants visages des pauvres diables revenus de la 1e guerre, les gueules cassées, tannées par l'épreuve, bourrues par les coups, forgées par le tabac et le vin, parfois pliées autour d'une paire d'yeux pourtant eux toujours très perçants. Eric Lecoiffier, dit "La Coiffe" est un bon entraineur dont les résultats parlent pour lui. Mais pas glamour, pas gentleman-farmer et encore moins déguisé en chasseur, il n'a pas un style à attirer les propriétaires, qui doivent le connaître pour lui faire confiance.
Eric Lecoiffier après la victoire de Reglis Brunel dans le Prix des Drags (PHOTOS APRH)
Les anciennes écuries d'Idéal du Gazeau
C'est ainsi qu'il a reçu Réglis Brunel, AQPS de 6 ans, né dans le Loire-et-Cher mais élevé en Charentes par un couple venu de l'Ile de Ré, Bénédicte et Frédéric Lavaud, désormais installés au Haras de Rochefort. Les deux hommes se connaissent depuis 20 ans, car Frédéric était l'ostéopathe de Guy Chérel à l'époque où celui-ci entrainait les chevaux de Jean-Claude Evain au Haras de Mirande, à Sartilly dans la Manche, là où travaillait aussi Eric Lecoiffier. Aujourd'hui, Frédéric Lavaud monte tous les deux mois pour soigner les chevaux d'Eric. Ce dernier a ses chevaux à Saint-Jean-le-Thomas dans les anciennes écuries d'Idéal du Gazeau, qui n'ont que ça comme avantage, mis à part leur proximité avec la plage, car l'endroit menace à chaque instant de s'écrouler sur lui-même et sur ses 30 pensionnaires. Il attend avec impatience les travaux du nouveau centre d'entrainement de Dragey, qui vont commencer très bientôt, puisqu'il va y construire une écurie toute neuve.
Courageux, Reglis Brunel vient arracher le succès sur le fil au centre à Pibrac à la corde et Mick Passoa à l'extérieur
" Oui c'est mon 1e groupe...en obstacle"
Les entraineurs sont presque tous pareils. Ils tirent le diable par la queue. C'est dire si les 106.000 euros de l'allocation au vainqueur du Prix des Drags, dont il va toucher la majorité puisqu'il a le cheval en location, lui assure la couverture de ses charges de personnel au moins jusqu'à la fin de l'année ! Et puis il y a le sport, la gloire, le prestige, bien que ce ne soit pas une 1e pour Eric Lecoiffier. En effet, cet homme qu'on n'imagine pas en costume cravate a eu les plus grands honneur du temple du galop, à Longchamp, lorsqu'il y a gagné le Prix de Barbeville, un Gr.3, avec Petite Spéciale en 2006. Associée à Christophe Lemaire, Petite Spéciale devançait un sacré lot : Lord du Sud, Reefscape, Shamdala et Tunduru, grand cheval d'1,73 m qui a fait une saison de monte en tant qu'étalon en 2010 au Haras de Rochefort chez Bénédicte et Frédéric Lavaud ! Quatre mois plus tard, Lacoiffe, tout engoncé dans son costard flambant neuf puisque jamais sorti du placard, pénétrait dans le rond de présentation de Longchamp le jour de l'Arc de Triomphe pour participer à un Gr.1, le Prix du Cadran, dont il concluera 5e.
Eric Lecoiffier en cravate avec Christophe Lemaire lors sa 1e victoire de Gr.3 à Longchamp avec Petite Spéciale en 2006.
Un gros AQPS noir venu de la Nièvre
Son entraineur a une vrai gueule, dite de cinéma car elle se reconnait. Le cheval a lui bien la tête de l'emploi pour les gros parcours d'Auteuil. C'est un bon gros AQPS tout noir tardif, fils d'Ungaro qui fait lui-même des produits pas précoces. Sa souche maternelle vient du centre de la France, la Nièvre, chez la famille Sayet qui se situe juste à la sortie de Cercy la Tour en direction de Montigny/Canne, là où s'alignent en quelques encablures les d'Armaillé, Magnien, Colson, Cyprès, etc...C'est la souche de Cérès de l'Isle, Moka de l'Isle, Ola de l'Isle, mais aussi Lykaon de Vauzelle. Le couple Lavaud a récupéré la mère de Reglis Brunel, Lady du Rocher dont il est le 1e produit, chez Guy Chérel car entre temps, une branche était arrivée dans la Manche chez Mme Marie-Grandin. A noter qu'un autre branche a été récupérée par Alexis Bouillot, éleveur de la Saone-et-Loire qui présente ce vendredi au concours de Paray-le-Monial un frère de la mère de Réglis Brunel par Dom Alco nommé Volverine d'Albain. A suivre.