Grand Prix de Pau pour Rubi Ball : des mariages, deux divorces, un enterrement

23/01/2012 - Actualités
Le meilleur steeple-chaser français Rubi Ball, dont les deux éleveurs s'entre déchirent, s'envole hors d'Auteuil, à Pau, devant son public et son compagnon de casaque, Quick Fire. Pendant qu'à quelques mètres du poteau d'arrivée, le 3e "Papot", Berryville, tenant du titre, est en train de mourir. Le 125e Grand Prix de Pau est une histoire à rebondissements.



Les mariages


Voir Rubi Ball, qui est le meilleur cheval d'obstacle en France, s'exprimer hors du temple d'Auteuil, est un ravissement tant pour le sport, puisque c'est la preuve qu'un tel "avion" peut s'adapter, que pour le public palois, qui a la chance et l'honneur d'avoir devant ses yeux celui a failli gagner le Grand Steeple-Chase de Paris 2011, et qui l'emportera sans doute en 2012. C'est aussi le plus belle preuve d'amour d'une région et d'une culture pour le cheval. Rubi Ball est entrainé sur place par Jacques Ortet, le plus grand fan de la ville que Pau puisse abriter, qui remporte le Grand Prix pour la 14e fois  (!). Ce mariage  est aussi celui de l'obstacle avec une casaque, celle de la famille Papot, qui domine la discipline en France, ce qui se traduit symboliquement par une un succès total : un jumelé gagnant de Rubi Ball et Quick Fire pour une 4e victoire consécutive dans ce Grand Prix.

NB: toutes les images et vidéos de cet article proviennent du groupe "Ecurie Papot" sur Facebook, un groupe animé par Serge Bizeul et remarquablement alimenté.

 

 

 

Voir le 125e Grand Prix de Pau en vidéo

 

 
Tout le monde dit que le propriétariat français est mort. Cela n'est pas totalement faux mais ce dimanche classique est une belle de l'inverse. A Vincennes, Gérard Augustin-Normand, venu au trot en partant du plat, fait l'exploit dans le Prix de Cornulier avec Quif de Villeneuve. Preuve qu'on peut gagner au trot sans être dans le milieu depuis 3 générations. A Pau, la famille Papot, des purs propriétaires qui n'élèvent pas eux mêmes mais achètent des dizaines de foals par an (les plus gros acheteurs français dans ce registre) font tourner une écurie de très haut niveau. C'est une très bonne chose pour les courses françaises : les éléments d'élite qui défendent cette casaque ne traversent pas aussitôt la Manche. Des champions d'obstacle restent ainsi dans l'hexagone.

 

Les divorces


C'est la 2e fois que Rubi Ball gagne ce Grand Prix de Pau. Dans la foulée d'une déjà très riche saison de 4 ans en 2009 au cours de laquelle il avait battu Long Run dans le Prix Ferdinand Dufaure (Gr.1), conclu 2e du même rival dans le Prix Maurice Gillois (Gr.1), puis devancé Mail de Bièvre dans le Prix Morgex (Gr.2), Rubi Ball avait enchanté le public dans le Grand Prix 2010. Enchanté mais aussi fait trembler les tribunes lors d'une énorme faute à l'avant-dernier obstacle. Cette fois, son partenaire David Cottin s'est méfié et a sérieusement commandé le cheval sur ce saut. Mais à l'époque, celui qui est devenu le meilleur jockey d'obstacle en France avait du s'arrêter, en selle du Will Tonic dans cette course. Et c'est Christophe Pieux, l'enfant du pays de Pau qui avait grandi dans l'écurie de Jacques Ortet, qui était dans la lumière, sur le dos de Rubi. Il ne savait pas que son mariage avec Rubi Ball allait s'arrêter sur ce succès.

 

Alors que Christophe Pieux était associé à la 1e victoire de Rubi Ball dans le Grand Prix de Pau 2010, c'est David Cottin qui a pris sa place en 2012.



Pendant ce temps, côté cour, ou plutôt côté champ, le divorce entre les deux artisants de la naissance du champion reste des plus tendus. Tout deux de la région de Charolles en Saone-et-Loire, Jean-Louis Berger et Pierre Duvignaud sont les 2 co-éleveurs de Rubi Ball. Le 1e possède la souche maternelle. Faute d'espace, il avait confié le poulain pour son élevage au 2e, contre la moitié de la prime à l'éleveur, comme tous les produits d'Hygie jusqu'alors. Voici la version "Berger". Pierre Duvignaud affirme lui que l'origine du cheval remonte à une souche que sa propre famille a possédé. Il cherche à la faire savoir par tous les moyens (voir dans quelques jours un document d'époque livré à France Sire) et s'étrangle quand il est oublié en tant qu'éleveur, comme sur Equidia qui affiche après course le 1e éleveur de l'ordre alphabétique, c'est à dire Berger...

 

En décembre 2009, à Cercy-la-Tour, Jean-Louis Berger (à gauche) et Pierre Duvignaud, les deux coéleveurs de Rubi Ball, sont réunis pour la dernière fois sur une photo, même si la tension entre les deux hommes avait obligé Karine Perreau (récompensée lors de cette assemblée pour un autre cheval) à faire le tampon.



Ce divorce a été matérialisé en décembre 2010 sur le ring de Deauville, par le passage aux ventes de la mère de Rubi Ball, Hygie, rachetée par Duvignaud pour 45.000 € alors qu'elle était vide, âgée de 15 ans. Quand à l'ultime foal commun, Action Ball, fils de Network donc propre frère de Rubi Ball, il était acquis  70.000 € par le duo anglais Kemble/Atkinson, déjà détenteur de Mail de Bièvre et Kauto Stone. Hygie attend un produit de Network mi-mars 2012. L'étalon et son entourage (les Haras Nationaux) remercient chaque jour Rubi Ball. Grâce à ses exploits, Network a sailli 127 juments en 2011 !

L'enterrement

En 2010, il y avait 4 partants Papot dans le Grand Prix de Pau : Rubi Ball gagnait devant Quick Fire, une révélation de l'élevage d'Eric Aubrée, débourreur bien connu mais aussi habile éleveur au Haras de la Placière dans le Maine-et-Loire. Will Tonic s'était arrêté et Ograndy, élevé dans la Manche par son ancien entraineur Alain Couétil, s'était tué. Malheureusement, 2 ans plus tard, l'histoire se répète pour le meilleur mais aussi pour le pire. Rubi Ball gagne a nouveau devant le fougueux animateur, Quick Fire, sauteur brave et courageux de chez Jacques Ortet qui l'avait reçu alors qu'il avait aligné 4 échecs radicaux chez Guillaume Macaire. Mais de nouveau, il y a eu un mort. Et de plus, à la rivière des tribunes, face au public. A quelques mètres du poteau d'arrivée où le vainqueur exultait, Berryville agonisait. Il s'était "écartelé" à la reception de l'obstacle.

 

Toujours resté dans l'ombre des champions, Berryville a tout de même eu une très carrière couronnée par 14 victoires dont 2 Grand Prix de Pau, avant de mourir au champ d'honneur.

 

Dans l'ombre du Rubi, et beaucoup moins célèbre, Berryville était pourtant un double vainqueur de ce Grand Prix de Pau, en 2009 et 2011. Le fils de Poliglote avec une mère par Kaldounévées, mais aussi cousin de Dunaden, élevé par le Comte Decazes au Haras de Maulepaire, était sorti de l'anonymat après son achat à réclamer lors d'une victoire à Saint-Cloud chez Dominique Sepulchre. Alain Couétil l'avait acquis au printemps pour le compte des Papot pour faire leader leur champion de l'époque, Young Poli. Il l'avait aidé à atteindre son objectif dans le Derby de l'Ouest, prenant même la 3e place. Depuis, le divorce a été prononcé l'entraineur et les propriétaires, qui n'ont plus rien en commun puisque l'élève puis l'ancien pensionnaire d'Alain couétil sont morts au champ d'honneur.

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