Lacarolina, Lucky Speed et...l'élevage Head !

30/07/2013 - Focus Elevage
Les aïeules de Lacarolina et Lucky Speed ont pour point commun, celui d’avoir fait partie du premier contingent de poulinières achetées par Alec Head après l’acquisition (1958) du Haras du Quesnay, et ce, au début des années 60.

LACAROLINA : un entourage bien inspiré

Sous la responsabilité de Thierry de Laurière, qu'on connaissait plus en tant que champion des anglo-arabes, Lacarolina, fille de Chargé d’Affaires (un ancien Moratalla, gagnant, entre autres du Prix Morny) et de Malinday (Lord of Men) s’est imposée, pour les couleurs de Jean-Marie Lapoujade, à Toulouse le 9 juin dernier dans une course « D » aux dépens d’un poulain estimé d’Hervé Morin et de Jean-Claude Rouget, Salai (Myboycharlie, lui aussi vainqueur du Prix Morny).
 
A l’instar de Mahmoud Fustok à une époque, Jean-Claude Rouget fait une offre à Jean-Marie Lapoujade, son propriétaire-éleveur, qui ne se fait pas prier. Olivier Carli, le propriétaire du Haras du Logis Saint-Germain, associé à Gérard Augustin-Normand, s’en porte acquéreur à l’amiable. Un mois et demi plus tard, elle gagne plaisamment le Prix Six Perfections, une Listed sur 1.400 m. disputée à Deauville. Son avenir pourrait évoluer au niveau supérieur selon son nouvel entourage.
 
 
Lacarolina, montée par Gregory Benoist.
 
 
Premier contingent de poulinières au Quesnay
 
Le Quesnay a accueilli tout d’abord des étalons avant les contingents de poulinières : Lucky Dip (un fils d’Alizier en provenance d’Angleterre), Amboise (un fils de Sicambre) et un fils de Fair Copy, Damasco. En 1961 arrive Prince Taj, un fils de Prince Bio, placé de la Poule d’Essai. Viendra ensuite celui qui était né quelques années plus tôt dans les mêmes lieux, Le Fabuleux. Le décès en juillet 1955 de l’ancien propriétaire du Haras du Quesnay, l’américain Abraham-Kingsley Macomber(qu’il avait acquis ou hérité de la part de la famille Vanderbilt dans les années 20) font que les lieux resteront quasiment à l’abandon avant que la famille Head ne reprenne le flambeau en 1958, d'autant plus que le site était resté déjà vide depuis la fin de la guerre.
 
 
C'est à l'époque de Le Fabuleux, à la construction de l'empire d'élevage d'Alec Head, que les poulinières sont arrivées au Quesnay.
 
 
La restauration du haras du Quesnay est à peine terminée en 1959 que l’on annonce déjà la naissance des premiers foals suite aux achats de poulinières diverses et variées. Certaines sont importées d’Angleterre ou d’Irlande, d’autres de haras voisins ou sortant de l’entrainement et certaines placées en pension par leurs propriétaires «sans sol». Parmi ces dernières, figurent Anguar (fille de Verso) qui débutera la réputation du haras du Quesnay grâce à la naissance et à la carrière (dirigée par William Head à Maisons-Laffitte) de Le Fabuleux (Wild Risk), le bien nommé.
 
Parmi les premiers contingents figuraient également deux juments qui font l’actualité aujourd’hui grâce à leurs descendances, Lacarolina et Lucky Speed.
 
 
Alec Head

 

Lacarolina, issue d’une aïeule importée d’Angleterre

 
La 7e mère de Lacarolina, Sariegail (née en 1956 de Hill Gail et d’une mère par Nearco) était restée maiden à 2 et 3 ans, puis avait enfin ouvert son compteur à 4 ans en Angleterre. Auréolée de 2 victoires, elle entre au haras et donne naissance en 1962 à une pouliche qui ne restera pas dans les annales. Pleine de Relic en 1963 (un étalon globe-trotter, en station à l’époque en Angleterre), Alec Head s’en porte acquéreur. Son premier produit pour le Quesnay s’appellera Samira. Gagnante à deux reprises, elle ne laissera pas au haras un souvenir impérissable. Seule, 40 ans plus tard, Querbasa de Kerpaul (Prix Sytaj) donnera un peu de gras en obstacle à cette branche.
 
En 1965, naitra Sire, un fils de Mourne. Vainqueur pour Mme Alec Head, il entrera au haras comme étalon. Viendra la naissance de Saratoga en 1966, une fille de Snob. C’est elle qui rendra à la famille Head le retour sur investissement. 
 
 
Télécharger le pédigrée complet de LACAROLINA
 
 
Saratoga, c’est l’Amérique !
 
Saratoga, la 6e mère de Lacarolina, avait débuté victorieusement dans le Prix de Chaillot à Longchamp (une course pour inédites de 3 ans toujours d’actualité) mais n’avait pu confirmer ensuite au même niveau. Direction le haras à 4 ans où elle fera donc les beaux jours du Quesnay : 
  • 1971 : Sinaia (Habitat), grand-mère de Satco (1983 Blakeney) Prix Berteux, 2e et 3e Prix du Cadran puis étalon) et de Neretva (1984 Vayrann), Prix des Yearlings.
     
  • 1972 : Sasor (Cadmus), 3ème du Prix Georges de Talhouët-Roy de Quart de Vin.
     
  • 1973 : Sabbatine (Dike), gagnante du Prix de l’Elevage (Listed à l’époque, le handicap le plus convoité pour les pouliches). Mère de deux foals, nous tairons sa carrière au haras.
     
  • 1974 : Sèvres (Riverman), gagnante du Prix Coronation (L.), elle donnera naissance ensuite à Saint Cyrien (Grand Critérium puis étalon). Malgré le fait d’être décédée prématurément (4 naissances seulement), elle fera partie d’une des meilleures familles maternelles du Quesnay par sa fille Silvermine (Bellypha),gagnante de la Poule d’Essai, seconde du Prix Marcel Boussac et du Prix de l’Opéra (Gr.2), 3e du Prix Jean Prat. Sa descendance est exceptionnelle : Sillery, Silvering, Silva, Silver Pond, Silver Point, Savoie, Songe, Sarrasin, Spain….Cette dernière est la mère de Matwan (Indian Rocket), de Myasun (Panis),de Malinday d’où Lacarolina.
     
  • 1975 : Squatter (Satingo), mort prématurément après une victoire à 3 ans.
     
  • 1977 : Satilla (Targowice), vendue à réclamer lors de sa seconde victoire à 3 ans, elle fera les beaux jours de son nouveau propriétaire en remportant le Prix de la Porte de Passy (L.) et en se classant, entre autres, 3e Prix du Conseil de Paris (Gr.2). Elle passera ensuite à deux reprises sur le ring de Keeneland. Mère de 4 vainqueurs, elle n’aura pas la même réussite que sa sœur.

 

La rentrée des foals au Haras du Quesnay, sous l'oeil du patron.

 
Notes
 
-Après avoir donné naissance à 16 foals et après une retraite bien méritée Silvermine est décédée en janvier 2011.
-Spain, la grand-mère de Lacarolina, avait été réclamée par Guy Duval-Lemonnier à 2 ans puis revendue comme poulinière en 1999, achetée 120.000 F. à Deauville. Elle serait décédée il y a quelques jours en Dordogne chez Maxime Jarlan. Elle avait donné naissance en 2011 à Eyes of War (f. Muhaymin) et cette année à un poulain de Siyouni.
 
-Malinday, la mère de Lacarolina, a donné naissance en 2012 au Haras de Galouin chez Christophe Jouandou à Créon en Gironde à Adara, sa propre sœur, qui portera le lot 3 à la vente de La Teste Osarus (Voir le pédigrée). Cette année, elle a eu un poulain de Deportivo.
 
-Matwan, la tante de Lacarolina, avait été réclamée à Maxime Jarlan par Guy Pariente à l’issue du Prix de la Marche lors de ses débuts à 2 ans. Elle fait partie de la jumenterie du Haras de Colleville. Sa 2 ans, son yearling et le foal de l’année, une pouliche, ont bien évidemment pour père, Kendargent.
 
 
Lucky Speed s'impose dans le Derby d'Allemagne 2013 devant Très Blue, entrainé par Henri-Alex Pantall.


LUCKY SPEED : Mais quel rapport avec la choucroute ?

 
Pourquoi évoquer l’élevage allemand, me direz-vous ? Mais parce que le vainqueur du Derby allemand 2013 est issu d’une famille Head débarquée en Normandie à la même époque que l’aïeule de Lacarolina ! Fils de Silvano (un Lomitas) et d'une mère par l'incontournable Monsun, Lucky Speed est entrainé par le Fabre allemand, Peter Schiergen à qui décidemment tout réussi (victoire ce dimanche dans le Gr.1 de Munich, le Grosser Dallmayr Preis). A noter qu'à Hambourg, Lucky Speed devancait le «Pantall», Très Blue (Anabaa Blue), un élève d’Horst Rapp, élevé tout près de Deauville.
 
 
 
 
Lucky Speed : son aïeule débarque en Normandie
 
Elevé par la Gestut Ittlingen (la famille Ostermann), Lucky Speed a rejoint les boxes de Peter Schiergen suite à son achat aux ventes de yearlings de Baden-Baden. Rüdiger Alles (International Vollblut Agentur), agissant pour la Stall Hornoldendorf (Arend Oetker), avait déboursé 46.000 €. Son demi-frère par Montjeu (Lyonell, né en 2011) a aussi foulé le ring de Baden et en est reparti après une enchère de FBA à hauteur de 240.000 €.
 
Son origine française remonte au début des années 60 après qu’Alec Head se soit porté acquéreur de sa 5e mère, Belle de Retz (née en 1962 de Gilles de Retz), élevée par Mme W. Whitehead, aux ventes de décembre à Newmarket.
Gagnante à trois reprises à 2 ans en Angleterre en 8 sorties, Belle de Retz en fera de même en France à 3 ans, montée par l’apprenti qu’était encore Freddy Head.
 
L’année suivante, elle fait partie de l’effectif des poulinières du Quesnay où elle sera saillie par Cambremont (un fils de Sicambre exporté ensuite en Argentine, élevé par la famille Chambure et vainqueur de la Poule d’Essai pour la famille Bouchara). Le foal s’appellera Belmont et sera vendu yearling par l’association Head-Chambure. Après une brillante carrière en France (Prix Eclipse, 3e Prix Daphnis), il deviendra top-étalon en Scandinavie après une incartade aux USA.
L’année suivante, en 1968, naîtra Belga, une fille de Le Fabuleux. En course, elle s’imposera à Compiègne à 3 ans et au haras, elle mettra au monde 15 foals de 1973 à 1990.
 
 
Bellypha
 
 
Les poulains les plus doués de la famille auront été Bellypha (Lyphard) et Bellman (Riverman). Le premier a été vendu yearling à Jacques Wertheimer pour 410.000 F. à Deauville. Vainqueur de quatre Gr.3 (Jonchère, Daphnis, Thomas Bryon, Quincey), il ne s’inclinera que face à Irish River dans le Prix Jacques Le Marois 1979. Il deviendra le père de Silvermine (la famille de Lacarolina). Quant à Bellman, il portera les couleurs de l’écurie Aland pour qui il s’est imposé dans le Prix Eugène Adam (Gr.2) devant Al Nasr et a terminé à la 3e place du Gran Premio del Jockey Club (Gr.1), celui de Konigsstuhl (le futur père de Monsun, entre autres, amusant, non !).
 
 
Télécharger le pédigrée complet de Lucky Speed.
 
 
Quant aux pouliches, une seule s’est vue attribuée le « black-type », Brillante, la bien-nommée. Elle a remporté pour l’Ecurie Aland, le Prix de la Seine, puis a terminé seconde de Marie de Litz dans le Prix de Royaumont. C’est à elle que l’on doit les caractères gras de Trip To The Moon et de sa fille Trois Lunes (Prix Vanteaux pour le Haras de Saint-Pair).
 
Les autres, si elles n’ont pas spécialement brillé sur la piste, elles ont par contre été de bonnes mères au haras comme :
 
  • Blanche Reine (née en 1982 de Nureyev), gagnante à 3 ans, a donné naissance à Balleroy (Kaldoun), vainqueur, après avoir été vendu yearling, du Prix de Guiche et terminé second du de Sillery (le fils de Silvermine) dans le Prix Jean Prat (Gr.1). Il aura une seconde carrière au haras national.
  • La Luna (née en 1985 de Lyphard), gagnante à 3 ans, a été vendue puis a donné Etoile (1994), 3e des Musidora St. (Gr.3) et Corrine (1999), gagnante de Listed en Scandinavie. Outre ses deux pouliches, elle a donné naissance en 1990 à La Lyra, vendue yearling, 150.000 F., en partance pour l’Allemagne puis revendue à Deauville 3 ans plus tard. C’est d’elle que descend Lucky Speed.

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