L'Xcellence du Haras d'Ecouves chez Elisabeth et François Doumen

05/04/2014 - Grand Destin
Xcellence, fille de la première production de Champs-Elysées, a devancé la qatari-montoise Vorda dans le Prix Imprudence, préparatoire aux Guinées anglaises ou françaises. Elevée par les époux Doumen associés à Henri de Pracomtal, elle descend d’une jument achetée lors des débuts du Haras d’Ecouves. Par Xavier Bougon.
Xcellence devance l'excellente Vorda dans le Prix Imprudence 2014. Elle était montée par Cristian Demuro (Photos APRH)
 
 
Un croisement amusant et réfléchi ?
 
Xcellence est une nièce d’un certain Kasbah Bliss, né des amours de Kahyasi et de Marital Bliss (Double Bed). Sachant que Champs Elysées (fils de Danehill et de la matrone Hasili) a pour grand-père maternel, un certain Kahyasi, n’y aurait-il pas là un croisement mûrement réfléchi (?).
 
Xcellence permet donc à son père de signer son premier black-type à ce niveau. La semaine dernière à Leopardstown, une autre de ses filles, Avenue Gabriel, a terminé à la 3ème place des 1000 Guinées Trial St. (Gr. 3) après avoir, à 2 ans, gagné sa Listed et été placée des Debutante St. (Gr. 2) derrière deux Galileo (Tapestry et Perhasps). Son prix de saillie a diminué de moitié depuis son entrée au haras (en 2010 à Banstead Manor Stud chez Khalid Abdullah). Il est passé de £10.000 à £5.000 cette année.
 
Notes :
 
Rappelons que le fils d’Hasili a débuté sa carrière chez André Fabre et qu’il l’a prolongé aux USA. Il a été le dernier pensionnaire de Bobbie Frankel, décédé tout juste un mois après sa dernière prestation, une sortie victorieuse, le Canadian International, le 17 octobre 2009.
 
 
L'oncle de Xcellence, Kasbah Bliss se rend ici au départ du Prix du Cadran 2011, course qu'il a remporté à l'âge de 9 ans
 
 
Les débuts des époux Doumen
Né dans la Vienne, François Doumen (en photo ci-contre avec son épouse Elizabeth) débute dans le métier comme gentleman-rider (250 montes environ en plat) tout en étant assistant de son père, Jean, entraîneur à Maisons-Laffitte depuis 1926.
 
Par volonté d’indépendance, François Doumen et sa petite valise, à moitié vide, part en Afrique du Sud chez des amis. Il crée une affaire de prêt-à-porter et découvre la passion de la planche à voile et du polo. C’est au Club d’Inanda, au cours d’un tournoi de polo à Johannesburg, qu’il rencontre la fille d’un commissaire de courses, Elizabeth Krause (alors âgée de 19 ans) qui «était née à cheval». Trois ans plus tard, c’est le coup de foudre. Rédactrice en chef d’Habitat, Elizabeth et François se diront «oui» en novembre 1974 et de leur union, naîtra en Afrique du Sud (à Sandton, près de Johannesburg) leur premier fils, Xavier.
 
En 1977, Jean Doumen connaît quelques problèmes de santé. François abandonne maillets, dérives, fringues et soleil et revient en France afin d’épauler son père qui mettra un terme à sa carrière peu de temps après. François obtient sa licence d’entraineur et en 1979, il déménage à Chantilly et s’installe dans une écurie louée à Léon Flavien : « L’étiquette de Chantilly a beaucoup d’importance auprès des étrangers et de ce fait, la vie y est plus internationale. »
 
Il «sort» en 1983, une bonne pouliche, propriété de son éleveur Louis Sayer (qui avait créé de toutes pièces, en 1972, un haras moderne, La Huderie), Lady Eglantine (Lightning), qui, malgré une fracture du paturon, se classera 4ème du Prix Pénélope derrière Smuggly, Escaline et Alexandrie (excusez du peu !). Pour l’anecdote, Lady Eglantine, donnera naissance à, entre autres, Miss Brésil...
François a goûté au «classique» et il en redemande : on connaît la suite.
 
Notes :
François Doumen prendra le risque d’acheter, sans client, un yearling 176.000 F. à Deauville (compte tenu de son papier, je ne l’ai pas payé très cher, mais la raison est d’être né tard, le 3 juin). Ce yearling, Double Bed, sera son premier partant dans un Gr. 1 (1er juin 1986 à Longchamp), le Prix Jean Prat, en l’occurrence, dont il terminera 4ème tout près de du trio de tête composé de Magical Wonder, Highest Honor et Art Français.
 
Gagnant de Gr. 1 aux USA, de Gr. 2 en France, second des Irish Champion St. de Park Express, devant Triptych) et placé de Gr. 1 en France pour le compte de Ronald Reeves, le fils de Be My Guest entrera au haras et fera le bonheur des poulinières de la famille Doumen, entre autres.
 
Au moment de son retour d’Afrique du Sud, son père possédait encore quelques bons chevaux dont les deux frères Nucladeno (Prix Maurice Gillois) et Nourylande, propriété de Monsieur et Madame Jacques Martinet, co-élevés par Jean Doumen
 
Tout commença avec Jimka et Tripolizza
 
A peine sa licence en poche, François Doumen fait son marché à Deauville et achète, pour ses premiers propriétaires, de jeunes chevaux dont des yearlings.
En août 1977, il se fait adjuger une pouliche d’Abdos, élevée par Patrick Champion et Jean Geslain, pour 44.000 F., une ancienne origine Boussac.
En août 1979, il remporte les enchères pour une fille de Jim French, élevée par Roger Besnouin au Haras de Grand’Cour, pour 32.000 F.
Les deux pouliches porteront la casaque d’une jeune propriétaire anglaise, Mlle Denela Platt (Noire, croix de Saint-André verte, toque écartelée vert et noir)
La première s’appellera Tripolizza (gagnante à 2 ans à Deauville du Prix de la Potinière) et la la seconde, Jimka (gagnante de sept handicaps sur les hippodromes parisiens).
Elles deviendront toutes les deux juments souches des éleveurs sans sol que sont les Doumen.
 
Le couple cantilien débute l’élevage dans les années 80 avec des juments mises en pension, soit au Haras de Grand’Cour soit au Haras de Victot, entre autres.
Les premiers produits de Tripolizza dont Gai Lizza (1982), sont élevés par l’association, Roger Besnouin et Elizabeth Doumen, ceux de Jimka naissent pour l’association Doumen-Mlle Denela Platt.
 
Gai Lizza (Gairloch) deviendra la mère de L’Année Folle (1993), de Rajpoute (1994), de Marital Bliss (1995), tous nés des amours de Double Bed. Marital Bliss mettra au monde en 2002 le fils de Kahyasi, Kasbah Bliss, et l’année suivante Xanadu Bliss (dont est issue, la gagnante du jour, Xcellence). Xanadu Bliss n’est, à l’heure actuelle, que la seule femelle de sa production.
 
Jimka mettra au monde le futur globe-trotter, Jim and Tonic (Double Bed) et sa propre sœur, Jimkana (qui une fois vendue donnera naissance à Petit Calva et Mauralakana).
 
Au fil des années et à la faveur de l’avènement de l’étalon Double Bed, les Doumen éprouvent le besoin de voler de leurs propres ailes, en un mot d’élever sur leurs propres terres.
 
Le Haras d’Ecouves et de Guébriant
 
Le Haras d’Ecouves débuta en 1990, à Cuissai (près d’Alençon), sur une ancienne ferme, où la superficie ne tarde pas à manquer. Faute de pouvoir acheter les terres avoisinantes, les époux Doumen se voient contraint de louer des terres chez Jean-Pierre Dubois.
 
Très vite, l’élevage Doumen (sous l’entité SARL Nupsala, du nom d’un champion AQPS sur le steeple vainqueur classique chez les british et second de Katko dans le Grand-Steeple de Paris) déménage au Guébriant, au lieu-dit Le Gué sur la commune de Boucé (Orne), toujours en bordure de la forêt d’Ecouves mais sur l’autre versant. Longtemps, le Haras de Guébriant fut la propriété du grand professionnel du trot, Pierre-Désiré Allaire, qui s’y était fixé sur les conseils de son associé, le Comte Pierre de Montesson, auquel la qualité des terres, arrosées par la Cance, n’avait pas échappé et dont le propre haras est d’ailleurs tout proche.
Aujourd’hui Guébriant est devenu Ecouves et les Doumen y ont, à la fois, leur centre d’entrainement (2 pistes en sable, l’une en ligne droite montante de 1.600 m. et l’autre en anneau de 1.000 m. avec un ruisseau en son milieu) et leur élevage, le tout s’étendant sur une centaine d’hectares de terres sur lesquelles une vingtaine de poulinières ont pris pension (dont la mère de Top Trip, Topka, issue d’une grand-mère achetée yearling à Newmarket).
 
Notes de la famille d’Xcellence
Kasbah Bliss n’est plus à présenter tant les aficionados l’on vu et revu sur les pistes plates et d’obstacles engrangeant pas moins d’1,3 M € de 2 à 11 ans, avec comme point d’orgue en plat, le Prix du Cadran 2011. Il vient tout juste de mettre fin à sa carrière après de bons et loyaux services.
Rajpoute est vainqueur des Prix Niel et Guillaume d’Ornano pour les couleurs de John-David Martin qui l’a ensuite vendu aux USA. De retour en France, il décède rapidement après deux saisons au Haras de Mortrée.
L’Année Folle, gagnante du Prix Minerve et 3ème des E.P. Taylor S. (Gr.2 à l’époque) derrière Mousse Glacée, mettra au monde Spectrofolle (Spectrum) pour l’association Doumen-M. Somerset-Leeke. Seconde du Prix de la Nonette, elle sera ensuite vendue au Qatar.
Marital Bliss, restera maiden sur la piste, non sans avoir pris quelques places dans des handicaps pour les couleurs d’Henri de Pracomtal.
Xanadu Bliss, n’ouvrira son palmarès qu’à l’occasion de sa dernière sortie à Chantilly à 4 ans. Outre Xcellence, elle a donné naissance en 2012 à Xhale, un poulain de Halling.
 
Quelques brèves sur la famille Pracomtal
 
 
Henri de Pracomtal, est le petit-fils de Guillaume, membre éminent de la Société des Steeple-Chases de France où il fût l’un des dirigeants les plus actifs durant 40 ans (il entra au Comité en 1932). Il fût également Premier commissaire après-guerre et Président de la Société des Courses de Pau.
Sa conduite héroïque pendant la première guerre lui valu la Croix de Chevalier de la Légion d’Honneur et la Croix de Guerre. Officier de Cavalerie au Cadre Noir de Saumur, il fût un brillant cavalier non seulement de concours hippiques mais aussi de courses à obstacles (110 montes et 23 victoires)
Ses activités de dirigeant ne l’empêchèrent pas d’être propriétaire. Il déclare ses couleurs en 1920 (Or, aujourd’hui jaune, ceinture, brassards et toque bleu-ciel, aujourd’hui bleu-clair).
Il remportera entre autres le Prix Maurice Gillois (Belmonte), le Prix Montgomery (Orage), deux pensionnaires entraînés par.....Jean Doumen.
Marié à Madeleine Hennessy, ils auront trois enfants dont Diane, future Mme Bernard Destremau (propriétaire chez François Doumen mais aussi chez Noël Pelat avec un certain Mansonnien).
Le benjamin de la fratrie, Alain, reprendra les couleurs de son père, décédé en mars 1973. Alain transmettra la casaque à son fils aîné, Henri en 1994, date de son agrément.

Membre du Conseil d’Administration de France-Galop en charge, entre autres, du nouveau Longchamp, Henri est associé au couple Doumen sur certaines juments ; il l’est aussi avec son frère cadet, Antoine de Pracomtal, qui a épousé Véronique Bougon (cousine de votre humble serviteur). 

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