L'histoire de DNA : Kaldoun, la saga des lièvres gris
KALDOUN (1975-2000), par Caro et Katana (Le Haar)
A l'automne 1980, un certain François de Linarès, aussi talentueux avec les chevaux que désastreux avec les finances, annonce fièrement qu'il vient de trouver le futur étalon qui fera sa fortune : Kaldoun. Il a acquis, sans finance cet ex futur favori de la Poule d'Essai, qui y a fini comme leader après avoir été battu par son propre leader, tout en poursuivant une bonne carrière jusqu'à 5 ans. Désargenté, François de Linarès cherche et trouve des porteurs de parts pour Kaldoun d'où sa carrière d'étalon en Anjou, au Haras de l'Aulnière entre Durtal et Baugé, là où entraîne aujourd'hui Donatien de Beauregard. Malgré la faiblesse du niveau de ses prétendantes, des petites juments de plat dans l'Ouest, il sort d'emblée de très bons 2 ans et ne cessera de monter les marches ensuite, jusqu'à faire l'objet d'une nouvelle syndication, cette fois d'une toute autre envergure, afin qu'il s'installe au Haras d'Etreham.
La glorieuse incertitude du turf confère souvent un large sourire aux turfistes amateurs de grosses cotes, contrairement aux professionnels dont le cheval avait été promu favori. Pour éviter de tels désagréments, de nombreux entraîneurs font appel à un leader pour mener leur champion à la victoire. Le lièvre est supposé emmener la course sur le bon pied, et s’effacer pour laisser filer son camarade d’écurie au poteau.
Kaldoun.(photo APRH)
- Prix de Fontainebleau (Gr.3), printemps 2010 : le gris Rajsaman est dévoué à la cause du Champion Siyouni mais, crime de lèse-majesté sous couleurs Aga Khan, Rajsaman remporte la course en laissant son compagnon une demi-longueur derrière lui.
- Grand Critérium (Gr.1), octobre 1979 : sous couleurs Fustok, le bai In Fijar se voit adjoindre un leader, le gris Dragon. Profitant d’un terrain très lourd et de la vista de son jockey (qui était en fait son lad, Alain Goldsztejn, au départ de sa première course PMU de l’année), Dragon survole la course en laissant son compagnon d’écurie dans le lointain…
- Prix du Jockey Club (Gr.1), juin 1961 : l’écurie Stern a deux champions au départ, le bai Free Man et le gris Sicambre, grand favori de l’épreuve. Mais Free Man fait un canter dans la ligne droite, et il faudra toute l’ardeur de son jockey pour le ralentir et permettre à Sicambre de prendre l’avantage aux abords du poteau…
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Prix de Fontainebleau (Gr.3), avril 1978 :le gris Kaldoun est le favori de l’écurie Aga Khan, en programmé pour la Poule d'Essai. On lui adjoint un leader, le gris Nishapour, qui prendra le large et ne sera finalement battu que de peu par le gris Kenmare, le gris Kaldoun terminant avant-dernier de la course.
Kaldoun (photo APRH)
Bis repetita dans la Poule d’Essai des Poulains (Gr.1) trois semaines plus tard, mais ce sera cette fois au tour du gris Kaldoun de servir de lièvre au gris Nishapour ! Changement de tactique judicieux : Nishapour l’emporte d’une classe. Il produira notamment le gris Mouktar, vainqueur du Prix du Jockey Club (Gr.1) l’année où son compagnon d’écurie Sumayr, gris de son état, terminera quatrième du Prix de l’Arc de Triomphe (Gr.1) à la hanche de … son leader Kozana ! Mais à la finale, Nishapour sera un échec considérable au haras, finissant sa carrière dans un petit haras d'obstacle en Irlande, tandis que Kaldoun aura atteint les sommets en partant de très bas.
Kaldoun était un fils du gris Caro dépendant de l’entraînement François Mathet, comme d’ailleurs le gris Crystal Palace. Pour l’anecdote, le Maître avait reçu les effectifs de l’Ecurie Rothschild deux ans plus tôt : alors qu’il supervisait l’embarquement de ses nouveaux pensionnaires, il s’était étonné de voir qu’un poulain gris était resté au box. On lui répliqua que le yearling, totalement ingérable, ne serait pas conservé. Ce à quoi il rétorqua : « Celui-là, je le veux absolument ! ». Et c’est ainsi qu’il offrit son premier Prix du Jockey Club (Gr.1) à la casaque Rothschild, Crystal Palace devançant son leader Concertino, troisième de l’épreuve !
Célèbre continuateur de Kaldoun, son fils Smadoun ici avec Antoine de Talhouet-Roy au Haras des Sablonnets.