L'histoire de DNA : Northern Dancer, né parce que sa mère était trop chaude

12/12/2019 - Grand Destin
L'Everest du pur-sang était le plus petit de tous. Du haut de son 1,52m, Northern Dancer est devenu le plus grand chef de racce de tous les temps, dont Thierry randsir nous conte ci-dessous le destin qui a débuté sur l'histoire d'une jument tellement chaude qu'elle en fut saillie par hasard.

 
 
 
 
Acquise $35,000 aux ventes de yearlings par le grand éleveur propriétaire canadien Edward Plunket Taylor, la pouliche de 2 ans Natalma, une fille du quasi-invincible Native Dancer et de la jument Almahmoud (Mahmoud), remporte les Spinaway St. (Gr.1) devant l’excellente Irish Jay en 1959 aux USA. Trop beau pour être vrai, elle est rétrogradée au troisième rang après réclamation, avant de subir une intervention chirurgicale à un genou…
 
 
 

 
 
Qu’importe, Natalma reprend l’entraînement et prépare sa vengeance. Objectif : les Kentucky Oaks. Nous sommes en avril 1960, à six jours de la course, pour un dernier galop dont elle rentrera … boîteuse. Un petit éclat d’os est détecté dans un genou, d’où une nouvelle convalescence.
 
Il y a près de 60 ans, les moyens de transports ne permettaient pas de rejoindre Toronto au Canada en un coup de camion. Natalma reste aux USA car son compagnon de couleurs Victoria Park est engagé dans le Kentucky Derby (dans lequel il se classera troisième de Venetian Way) et dans les PreaknessStakes (deuxième de Bally Ache). Un van est ensuite affrété à destination du Canada, avec pour passagers de luxe Victoria Park, qui sera déposé à Woodbine (où il remportera la Queen’s Plate), et Natalma qui sera débarquée au haras de Windfields Farm. Examinée à son arrivée par le vétérinaire, le diagnostic tombe tel un couperet : retour à l’entraînement inenvisageable pour la pouliche.
 
 

Northern Dancer avec son propriétaire éleveur EP Taylor après la victore dans le Kentucky Derby.
 
 
Comme nous sommes au milieu du mois de juin, E.P. Taylor décide d’attendre le printemps suivant pour la faire saillir. Mais Natalma ne l’entend pas de cette oreille, et montre de trop belles chaleurs pour que l’on se désintéresse de son cas. Soit. Le seul étalon disponible sur place est Nearctic, alors en première saison. Il fait preuve d’une très belle fertilité, alors on lui présente Natalma,sans trop se poser de questions. Onze mois plus tard, le 27 mai 1961,cette union décidée dans l’urgence engendre un petit poulain bai avec une liste et trois balzanes.
 
Alors peu convaincu par le cheval, E.P. Taylor présente Northern Dancer à ses ventes de yearlings, à Windfields, où il le propose au prix de $25,000. Qui veut d’un poulain de toute petite taille, né en toute fin du mois de mai et issu de deux parents qui débutent au haras ? Personne… E.P. Taylor le conserve, et l’envoie malgré tout à l’entraînement.
 
 

Le meilleur d'entre tous était aussi le plus petit
 
 
Là, il s’avère que le poulain développe des foulées d’une longueur démesurée pour sa taille, un modeste 1,52 m au garrot, et qu’il possède un changement de vitesse exceptionnel. Puissant mais très distingué, bien disposé bien que débordant d’influx (son entraîneur Horatio Luro proposa de le castrer !), il remportera 14 victoires en 18 sorties en l’espace de 11 mois : gagnant par 7 longueurs pour ses débuts sur 1100 m le 2 août de ses 2 ans,Northern Dancer enchaîne les succès dans le Coronation Futurity au Canada et les Remsen St. (Gr.1) aux USA, avant un triomphe dans le Kentucky Derby (Gr.1) en temps record et des victoires aisées dans les Preakness St. (Gr.1) et dans la Queen’s Plate.
 
Victime d’une péritendinite en cours de saison, Northern Dancer entre au haras avec le titre fort convoité de Champion des 3 ans en Amérique du Nord.Stationné au Canada aux côtés de son père Nearctic, il est proposé à $10,000 pour ses débuts et n’attire guère les foules. Seulement 21 foals en première saison, dont … 9 gagnants de Stakes ! Transféré dans le Maryland, son prix de saillie atteindra plus tard $1,000,000 payable sans condition !
 
 
 
 
Tête de liste sur tous les continents, père de 645 foals (27 par an en moyenne) dont 147 gagnants de Stakes (23% de sa production totale), on lui doit 35 gagnants de Gr.1 dont El GranSenor, Lyphard, Nijinsky II, Northern Taste, Nureyev, Sadler’s Wells, Storm Bird, The Minstrel et tant d’autres, sans oublier l’invaincu Danzig.
 
Northern Dancer est devenu le Chef de Race le plus influent de la deuxième moitié du XXe siècle. Depuis 30 ans, la lignée mâle qu’il a érigée s’est octoyé les deux tiers des courses de Gr.1 disputées dans le Monde, et près de 600 vainqueurs au plus haut niveau portent son nom au moins deux fois à 4 générations dans leur pedigree. Une génétique parfaite qui a incontestablement amélioré la Race Pure, mais peut-être pas le croisement idéal : Northern Dancer eut trois propres frères qui ne mettaient pas un pied devant l’autre en course (un placé de Listed et deux modestes vainqueurs),et qui furent de véritables calamités au haras !

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