L'histoire de DNA : Hail to Reason, la 3e chance

14/11/2019 - Grand Destin
Fan de courants de sang, Thierry Grandsir a déniché cette fois l'histoire du 3ème chef de race le plus important et pourtant le moins connu des courses modernes. Père de Roberto et Halo (d'où Sunday Silence), Hail to Reason a débuté aux Etats-Unis...en janvier de ses 2 ans ! il a couru 18 fois jusqu'à un accident grave au mois de septembre. Encore un destin à peine croyable pour un cheval aux aplombs médiocres et au mauvais caractère.

 

Née en 1948 aux USA, la jument Nothirdchance (= pas de troisième chance) fut nommée ainsi par son entraîneur-propriétaire Hirsch Jacobs en signe d’avertissement aux forces alliées, pour qu’ils n’accordent pas à l’armée allemande une troisième chance d’envahir l’Europe. Devant la concrétisation de cet espoir, il nomma le troisième foal de la jument Hail to Reason (= salut à la raison). Et sa troisième chance fut la bonne… 

 

 

Gagnante de la deuxième division des Acorn St. (aujourd’hui Gr.1) à 3 ans, Nothirdchance fut croisée au Champion Turn-To (Royal Charger), co-leader de sa génération à 2 ans aux USA et invaincu à 3 ans avant de s’accidenter durant sa préparation au Kentucky Derby (Gr.1). De leur union naquit le 18 avril 1958 dans le Kentucky Hail to Reason, un grand poulain déguingandé au modèle carossier, assez massif avec des aplombs médiocres, et un tempérament dominant vis-à-vis des autres foals au haras mais assez difficile envers l’homme.

 


HAIL TO REASON, m. 1958–1976,par Turn-To et Nothirdchance (Blue Swords)

 

Très précoce et doté d’une vitesse exceptionnelle, Hail to Reason était une véritable force de la nature, solide comme un rock. Heureusement du reste, car son entraîneur n’avait pas pour usage de ménager ses pensionnaires : Hail to Reason débuta en janvier de ses 2 ans et courut à dix-huit reprises jusqu’au mois de septembre de la même année ! 

Vainqueur à neuf reprises dont sept succès dans des Stakes, Hail to Reason était assez nerveux et inconstant mais il remporta son maiden sur les 1000 m de Aqueduct en temps record (58’’20) avant de s’adjuger les Sapling St. (Gr.1) et surtout les Hopeful St. (Gr.1) par 10 longueurs à Saratoga, établissant un nouveau record de piste en 1’16’’ sur 1300 m !

Hirsch Jacobs fut fortement critiqué en son temps pour le rythme infernal qu’il imposait à Hail to Reason (2 courses par mois pendant 9 mois à 2 ans). Ce à quoi il répliqua : « Je préfère qu’il soit complètement usé plutôt que complètement rouillé! ». Chacun appréciera…

 

 

Malheureusement pour lui, Hail to Reason n’eut pas de troisième chance au niveau Gr.1. Accidenté à l’entraînement en septembre de ses 2 ans pour avoir marché sur un fer lors d’un galop (occasionnant une double fracture des sésamoïdes),il ne put recourir ensuite mais il décrocha le titre de Champion des 2 ans aux USA cette année-là (1960). Il est clair que, sans son courage ni l’acharnement de Hirsch Jacobs à le soigner, Hail to Reason aurait été à deux doigts de laisser sa vie dans cet accident.

Entré au haras à 3 ans à Hagyard Farm où il était né, Hail to Reason fut d’abord catalogué comme un père de 2 ans exclusif, jusqu’à ce que son fils Roberto ne s’adjuge le Derby (Gr.1) sur les 2400 m d’Epsom. Qualifié Chef de Race version « classique », on lui doit 43 gagnants de Stakes sur 308 foals (14% de sa production totale) dont de nombreux Champions, et il se classa tête de liste des pères de gagnants aux USA en 1970.

 


HAIL TO REASON, 3e chance de la race pure après Northern Dancer et Mr Prospector

 

Vecteur de solidité, de tenue et de classe mais transmettant parfois de mauvais genoux, ses bons mâles étaient souvent petits et carossiers et ses bonnes pouliches plutôt grandes, avec un cadre qui fit d’elles de véritables moules à poulains : on leur doit en effet 114 gagnants de Stakes dont les classiques Allez France, Escaline et Triptych !

Derrière Northern Dancer et Mr Prospector, Hail to Reason est à notre humble avis la troisième chance de l’élevage international de l’après-Guerre. Sa dynastie s’est développée via le précité Roberto mais aussi via Stop the Music et surtout via Halo, géniteur de l’empereur Sunday Silence...

Le sang de Hail to Reason coule dans les veines des huit derniers vainqueurs du Prix de l’Arc de Triomphe (Gr.1) et sa génétique, aussi discrète que puisse l’être celle d’un troisième larron, est appelée à marquer durablement la race pure de son empreinte !

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