Prix Finot pour Zenta : l'Allemagne qui sait sauter

20/09/2022 - Actualités
Très efficace dans le premier peloton du Prix Finot des Pouliches, Zenta est une franco-allemande qui sait sauter. Si son entourage, des éleveurs à l'entraîneur est français, son père Pastorius est un germanique pure souche qui réussit chez nous, et sa souche maternelle sacre l'obstacle outre-Rhin, une discipline malheureusement disparue. 

Zenta, une gagnante de Finot au souvenir de l'Allemagne qui saute ! (aprh)

 

Une semaine après les pelotons des poulains, le Prix Finot s'ouvrait aux pouliches, avec un premier "lot" qui a vu une lutte acharnée entre deux pouliches prometteuses. Favorite et précédée de bons bruits, Jessi Sei a bien failli offrir un grand moment à la famille Magnien, mais s'est vue dominer sur le plat par Zenta. Magnifique, professionnelle, et bénéficiant d'une expérience de plat après avoir débuté cet été à Clairefontaine, la pensionnaire de Daniela Mele sacre assurément le savoir-faire français, mais aussi l'Allemagne qui sait sauter. 

 

Zenta avec James Reveley et sa mentor Daniela Mele (aprh)

 

En effet, Zenta a grandi au Haras de Cordelles de Ludovic Picard, ici associé à Antoine Lamotte d'Argy et Viktoria Duguey (Earl Ecurie du Fossé Blanc). Vendue en privé dans sa prime jeunesse, elle est arrivée chez Daniela Mele. C'était moins une car sa mère Zenturie est morte quelques mois plus tard. Zenta reste son 2e et ultime produit, que vous auriez pu acheter in utero à ARQANA en 2018... Finalement, la jument avait été rachetée 12 000 € sur le ring, pleine de Pastorius. Allemand pure souche, champion qui a su vieillir comme on l'attend d'un cheval outre-Rhin, l'étalon du Haras de la Hêtraie continue de faire très fort avec ses premiers 3 ans français. Zenta devient d'ailleurs sa première gagnante black type conçue en France, et ce quelques jours après que Start Me Up se soit très bien comportée dans le Prix d'Aumale (Gr.3)... un Groupe pour 2 ans ! 

 

Pastorius 

 

Zenta est elle-même une allemande "masquée", symbole d'une Allemagne qui sait sauter. Sa mère Zenturie, bien que restée inédite, était bien née puisque soeur du triple gagnant de Groupe en plat Zarewitsch. Et puis il y a son autre frère, Zent, qui était un phénomène de l'obstacle outre-Rhin, et qui était venu courir à Enghien... pour Peter Schiergen. Le crack entraîneur allemand est certes plus connu pour ses chevaux de plat, comme le fut d'ailleurs Pastorius, mais a aussi entraîné quelques sauteurs. Ce Zent en était un des bons, pour la casaque et l'élevage du Gestüt Bona, de la famille Harzheim. 

 

Jean Harzheim (Gestut Bona) avec Peter Schiergen aux courses de Baden-Baden...tout en tradition !

 

Jean Harzheim, l'actuel dirigeant du Gestüt Bona, est un client historique de Peter Schiergen. Transporteur équin de métier, il a eu la joie de gagner de très bonnes courses, dont le Preis Der Diana (Gr.1) avec Salomina en 2012. A l'époque, Bona était bien plus présent sur la scène hippique allemande... et notamment avec ses sauteurs ! Tout ceci paraît bien lointain puisque l'obstacle a quasiment disparu outre-Rhin, faute d'allocations, d'engouement de la part des propriétaires et donc des entraîneurs. Mais la famille Harzheim apparaît souvent dans le palmarès des bonnes courses de l'époque, avec des chevaux comme Zent, Bonito, Zollmer, Oldtimer, ou encore Gotham, un cheval qui avait battu le "Macaire" Pantruche dans une édition de la Grande Course de Haies de Baden-Baden. Les plus habiles se souviendront aussi de Nestor, un 4 ans entraîné par Peter Schiergen qui s'était imposé à Auteuil dans le Prix Varaville en 2007, avant de courir le Prix de Pépinvast (Gr.3). 

 

Nestor, gagnant à Auteuil en 2007 sous la casaque du Gestut Bona 

 

 

Eleveur de la mère de Zenta, le Gestüt Bona avait récupéré la souche en achetant la jument Aga Khan Zayraba, une lointaine cousine de Zarkava et Zainta. Cette grande famille sait sauter, comme on le sait, à l'image de Zarkandar, frère de la grande Zarkava, et champion en haies des deux côtés de la Manche. Le Gestüt Bona a fini par se séparer de beaucoup de chevaux, dont Zenturie, qui n'a jamais vu un champ de courses. Ainsi, elle a été dénichée en 2015 à la vente mixte de Baden-Baden, pour 6000 € par le courtier suisse Andi Wyss. Ce dernier avait des chevaux chez Antoine Lamotte d'Argy... et le lien est fait ! 

 

Zenta (aprh)

 Zenta est donc en quelque sorte un hommage à l'obstacle allemand, avec son père qui revit depuis son déménagement d'outre-Rhin, et son oncle champion d'une discipline oubliée au pays de la bière et de la saucisse. A notre manière, l'élevage français s'est depuis longtemps inspiré de ces courants de sang pour produire des sauteurs... et ce n'est certainement pas ce Prix Finot 2022 qui nous fera mentir. 

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