2.000 Guinées japonaises pour Efforia : un géant invaincu pas comme les autres
Efforia remporte les 2000 Guinées Japonaises en champion...(©Masakazu Takahashi)
Nos amis anglais et irlandais diraient d' Efforia que c'est un cheval pour Cheltenham ! Puissant poulain qui pèse sa demi-tonne, il a mis le monde à ses pieds hier en remportant de la tête et des épaules le Satsuki Sho (Gr.1), les 2.000 Guinées japonaises, restant de ce fait invaincu en 4 sorties. Efforia a pris la tête à l'entrée de la ligne droite et a pulvérisé ses nombreux adversaires sur les 2.000m de Nakayama, laissant une demie-seconde entre lui et le second. Ce n'est arrivé que deux fois avant cela dans l'histoire du Satsuki Sho : en 1994 avec Narita Brian et en 2011 avec Orfèvre, malheureux 2e de l'Arc de Solemia car il s'était complètement arrêté après avoir pris l'avantage. Ce jour-là, il avait la course à sa merci, et le Japon en pleure encore... Efforia avait gagné 2 fois à 2 ans dans des courses mineures, avant de remporter un Gr.3 préparatoire pour sa rentrée. Il sera bien sûr le grand favori du Derby, disputé le 30 mai prochain.
Evidemment, tout le Japon rêve d'Arc avec ce poulain aux limites inconnues, qui sera certainement encore meilleur sur 2400m. Il est monté depuis ses débuts par le jeune Takeshi Yokoyama, fils du vieux jockey Norihiro Yokoyama, qui avait remporté ces Guinées en 1998 avec Seiun Sky. Son fils savait alors à peine garder ses couches propres, puisqu'il venait de naître tout simplement ! Yuishi Shikato a été désigné comme l'entraîneur de l'élève de Northern Farm, l'entité de Katsumi Yoshida, frère de Teruya, qui dirige Shadai Farm. C'est d'ailleurs là-bas que Katsumi est allé pour concevoir Efforia, en utilisant Epiphaneia. Ce fantasque fils de Symboli Kris S, gagnant mémorable de la Japan Cup avec Christophe Soumillon, devient peu à peu la nouvelle star du pays, après avoir donné dès sa première génération la meilleure femelle de 3 ans en 2020, Daring Tact. Elle avait remporté la Triple Couronne des pouliches.
Epiphaneia remportant la Japan Cup avec Christophe Soumillon, avant de devenir le père de Daring Tact et maintenant Efforia
Elevée au Japon, la mère d' Efforia n'était qu'une modeste coursière par Heart's Cry nommée Katie's Heart. Elle avait toutefois pour elle d'être remarquablement bien née, puisque sa soeur My Katies a produit le crack Admire Moon, gagnant de la Japan Cup et de la Dubai Duty Free. La grand-mère, Katies First, était une sprinteuse douée qui avait gagné listed en Angleterre avant de venir chez John Hammond en France sous les couleurs de Sheikh Hamdan Al Maktoum. Elle y avait gagné le prix du Cercle sur 1000m avec Pat Eddery. Comme son nom l'indique, Katies First était le premier produit de Katies. Championne anglaise en 1984, Katies avait gagné les 1000 Guinées Irlandaises puis les Coronation Stakes. Elue meilleure 3 ans anglaise de la saison, Katies a passé toute sa carrière de poulinière aux Etats-Unis, mais a été acquise 1M$ en 1989 pour des intérêts japonais. Ses produits nés aux Etats-Unis ont grandement réussi au pays du Soleil Levant, à commencer par Hishi Amazon, gagnante de Gr.1 à 2 ans. Katies a été très prolifique avec 11 gagnants en 14 produits !
Revoir la victoire de Katies dans les 1000 Guinées irlandaises en 1984
La genèse de cette matronne inattendue se trouve en France, où sa mère Mortefontaine a été élevée par la famille de Saint Sauveur. Elle était la propre soeur de Polyfoto, un gagnant des Nunthorpe Stakes (Gr.1), et donc la 5e mère du nouveau champion japonais Efforia. Katies était l'un des rares bons produits de Nonoalco. Champion en piste entraîné par François Boutin, il avait gagné le Jacques Le Marois, le Morny et le prix de la Salamandre, mais aussi les 2000 Guinées... une affaire de famille ! Après une saison en France et six en Angleterre en tant qu'étalon, Nonoalco a été exporté au Japon, où il est mort en 1992 à l'âge de 21 ans. Katies reste comme son meilleur produit avec le crack miler Noalcoholic. Si ses rejetons n'ont pas aussitôt fait de lui un étalon influent, Nonoalco s'est révélé comme essentiel dans l'élevage de sauteurs en France. Il est en effet à l'origine de Nikos, à qui l'on doit le crack Master Minded (2 fois vainqueur du Queen Mother Champion Chase notamment). Il est un père de mères remarquable, ses filles étant à l'origine d' Apple's Jade, Roi Mage, Dalia Grandchamp, As D'Estruval ou encore Caesar's Palace. Nikos est aussi le père de Nononito, qui s'est fait connaître comme étalon en donnant la crack d'Auteuil Princesse d'Anjou.
Nonoalco s'est également illustré en tant que père de mère de Dom Alco. Le gris a eu une influence considérable dans le Centre-Est, et a contribué à la montée en puissance de la race AQPS. Crack étalon avec Neptune Collonges, Silviniaco Conti, Rhialco, ou encore Vézelay, son nom résonne encore à Cheltenham ces dernières années, puisqu'il est le père de la mère d'Al Boum Photo... Il était avant le coup impossible de voir un lien entre les obstacles et Efforia, si ce n'est qu'il serait sans doute très à l'aise sur les balais avec son physique de déménageur ! Sa famille a finalement une histoire particulière avec les Guinées, et une origine qui se situe loin des standards du grand élevage par principe. Katies, la matronne, n'avait après tout été achetée que 11.000 Guinées par son entraîneur Mike Ryan à l'époque ! Cela a suffi pour écrire la genèse d' Efforia, un crack que l'on a hâte de suivre, et pourquoi pas d'accueillir lors du premier week-end d'octobre à Paris Longchamp !
Nonoalco, très influent en obstacle...et maintenant au Japon !