Les courses en Chine : je t'aime moi non plus

26/09/2024 - Découvertes
Parmi les premières puissances économiques mondiales, la Chine possède cependant une industrie hippique très peu développée. La faute à l’interdiction des paris, incompatibles avec la morale du parti communiste chinois. Malgré cet écueil, de nombreux investisseurs et institutionnels chinois s’organisent pour tenter de structurer l’économie autour des courses. 

 Malgré l'interdiction des paris, les courses chinoises s'organisent

 
 
 
Tradition hippique et rigueur morale chinoise
 
La Chine est un pays fascinant et plein de contradictions. Dirigé par le parti communiste depuis 1949, le plus grand pays asiatique en termes de population et de superficie, n’en est pas moins le premier exportateur mondial. La politique maxisto-leniniste de référence de l’état parait en contradiction avec la réalité économique du pays, qui est une pièce maitresse du capitalisme mondialisé moderne. Comme de nombreux pays d’Asie, la Chine a une culture hippique et équestre très forte. Des archives littéraires démontrent l’existence de courses de chevaux mongols et arabes attirant plus de 80 000 personnes lors de grands évènements en Chine.
 
 
  Les courses de chevaux sont profondement encrées dans la culture chinoise
 
 
A l’inverse de ses voisins japonais ou coréens, la Chine n’a pas vu son industrie hippique se développer à grande échelle. La faute au parti communiste et à sa morale qui refuse que le peuple ne soit perverti par le jeu. Or, à Macao et surtout Hong Kong, deux régions chinoises avec régime administratif spécial, les paris sont autorisés et ont permis une expansion de la filière course. Une prospérité qui n’est d’ailleurs pas au goût du leader chinois Xi Jinping qui a décidé de mettre un terme aux activités hippiques de Macao, car « ne correspondant pas aux valeurs morales de la société chinoise. »
 
 
    Xi Jinping, le tout puissant leader communiste chinois
 
 
Des investisseurs passionnés et une industrie qui se structure
 
Malgré cette pression morale des dirigeants chinois, et l’interdiction des paris, de nombreux amoureux de courses, qu’ils soient investisseurs ou institutionnels s’organisent pour tenter de développer la filière course chinoise. En effet, dans le pays avec la plus forte croissance économique de ces dernières décennies, et celui qui compte le plus de milliardaires du monde, le « sport des rois » fascine et attire. Par exemple, le China Horse Club, une surpuissante entité composée d’investisseurs chinois a vu sa casaque jaune et rouge briller dans les plus grandes courses du monde, comme la Triple Couronne américaine avec Justify, la Breeders’ Cup Dirt Mile avec Life is Good, ou encore le Derby d’Epsom avec Australia, en copropriété avec Coolmore.
 
 
   Le crack Justify a fait brillé la casaque du China Horse Club
 
 
L’un des principaux acteurs de cette volonté d’expansion s’appelle Yuesheng Zhang. Parti du bas de la pyramide, cet entrepreneur a fait fortune dans les transports de minerais. Grand fan de courses, il investi massivement dans l’achat de chevaux pour sa casaque verte et blanche dans les grands pays de courses. Ce qui n’est d’ailleurs pas au goût du gouvernement chinois. En effet, ces achats massifs sont tolérés s’ils servent le pays et son développement économique.
 
 
 Yueshang Zhang, l'un des principaux investisseurs chinois
 
 
Ainsi en plus de son élevage et de sa colossale écurie internationale, Zhang souhaite développer et professionnaliser les courses de son pays natal. Ainsi, il a créé le Yulong Jockey Club une entité qui est à la tête d’un centre d’entraînement ultra moderne où sont entraînés quelques 500 chevaux, de quatre hippodromes, et organise même des ventes aux enchères, en partenariat avec l’agence australienne Inglis. L’élevage se développe également progressivement avec l’apport d’étalons issus des plus grands chefs de race mondiaux comme Galileo, Dubawi, ou Into Mischief, ainsi que par l’achat de juments aux pedigrees européens, américains et australiens solides.
 
 
 Gagnant de Gr.1 à Hong Kong, la japonais de naissance Neorealism fait désormais la monte en Chine
 
 
La Chine bientôt le nouvel Eldorado des courses mondiales ?
 
Si Xi Jinping est plutôt défavorable à l’activité hippique commerciale, des gouvernements locaux comme celui de Hohhot en Mongolie Intérieure aident grandement au développement de la filière. De fait, ces derniers estiment que cette activité constitue un boost en terme économique pour la région, est créatrice d’emploi, et permet également de développer le tourisme local. L’absence de prise de paris étant extrêmement limitante pour le développement et la pérennité de la filière, cette dernière doit son existence essentiellement au sponsoring, aux investissements massifs de la part de grandes fortunes locales, du soutient de gouvernements locaux et les entrées payantes sur les hippodromes.
 
 
Même sans l'argent des paris, des hippodromes modernes sont créés en Chine, et le public répond présent
 
 
Si au tournant des années 2010, le gouvernement chinois avait lâché du lest, et encouragé les initiatives de développement de la filière, Xi Jinping a entretemps fait machine arrière, notamment vis-à-vis de sa fermeté concernant la question des paris. Malgré cela, l’optimisme règne chez les acteurs de la filière hippique chinoise, qui souhaitent aller de l’avant et être des pionniers, sans compter sur l’état autoritaire. Conscient du potentiel énorme du plus grand marché du monde, les institutions des grands pays de courses dont la France (Arqana est partenaire d’une épreuve sur l’hippodrome de Yulong Park) sont à l’affut et souhaitent apporter leur savoir faire à cette industrie émergente. Xi Jinping n’étant pas éternel, la perspective d’un assouplissement de la rigueur concernant les paris pourrait faire de la Chine le nouvel Eldorado des courses mondiales, avec à la clé des milliards de dollars en jeu. 
 
 
 Mathieu Legars d'Arqana était présent en Chine pour représenter l'agence française

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