Afrique du Sud : Summerhill, au coeur du plus grand haras du continent
" D'un point de vue européen, le haras n'est pas si ancien, mais pour l'Afrique du Sud, l'endroit a très longue histoire, qui remonte à 1875. Le créateur sir Frédérick Moise a été le dernier Premier Ministre de notre région, le Kuazulu Natal, avant l'unification du pays." Si Mick Goss, le patron de Summerhill, est plutôt du genre visionnnaire et entrepreneur, il aime à rappeler que son haras n'est pas celui d'un nouveau riche. A la base, le créateur s'était installé ici au 19e siècle, dans les riches prairies des Midlands où la verdure luxuriante s'étend à perte de vue, pour y faire du lait. D'ailleurs, la compagnie fondée alors est devenue aujourd'hui la plus grande société laitière du pays. Plus tard, une famille de notables transformera l'endroit en lieu d'élevage de chevaux, gagnant de toutes les plus grandes épreuves après guerre, avant de s'endormir quelque peu sur ses lauriers et de se retrouver en situation de banqueroute. Depuis sa reprise par Mick Goss, il y a 28 ans, Summerhill a terminé 10 fois tête de liste des éleveurs et remporté 3 fois le Sun Met, l'Arc de Triomphe de Cape Town, la dernière en 2012 avec la crack Igugu (Galileo), également lauréate du Durban July.
En 1989, la situation de l'Afrique du Sud se retrouve dans un état très critique. En raison de l'Apartheid, les pressions internationales, politiques et économiques, excluent le pays du reste du monde. Ce pays riche arrive au bord du précipice. Les capitaux fuient. Plus personne ne veut laisser son argent à Johannesburg, Cape Town ou Durban, y compris les milliardaires du diamant et de l'or. En quelques mois, la situation va basculer et Mick Goss se retrouve au coeur d'un changement politique parmi les plus importanst et plus réussis de l'histoire moderne.
En effet, lui, le blanc qui a grandit dans les campagnes profondes avec les noirs, est ami d'enfance avec un prince zulu, très haut placé dans l'ANC qui cherche à renverser le pouvoir blanc qui impose l'Apartheid depuis l'après-guerre. Conseiller en droit du prince dans le plus grand secret, car celui-ci ne pouvait pas avouer publiquement avoir un ami blanc, il apprend auprès de ce dernier que les révolutionnaires ne souhaitent justement pas faire la révolution, mais appliquer une politique mixte d'apaisement. Il n'empêche que les blancs des campagnes prennent peur, fuient leurs domaines pour s'enfermer derrière de hauts murs en ville. Il y a de quoi. A l'époque, la grande mode de règlement de compte dans les 2 parties opposésdans la région de Summerhill et le coup de la cravate trempée dans l'essence, serrée autour du coup et enflammée...Confiant quand même, Goss prend la main sur les 1500 hectares de Summerhill.
Mick Goss
Par ailleurs, lui qui est devenu un avocat urbain, passionné de courses, connaît personnellement tous les grands propriétaires qui sont aussi les milliardaires du pays. La même année 1989, à peine installé à Summerhill, Mick Goss reçoit un coup de téléphone très surprenant de la part du ministre des finances, qui lui demande d'organiser un rendez-vous avec les 17 personnages les plus riches et les plus puissants d'Afrique du Sud, dont Oppenheimer, le patron des diamants De Beers, les dirigeants des 4 plus grandes banques, et les maîtres de l'agroalimentaires, du charbon, etc... " J'ai vu arriver les délégations, les gardes du corps, les voitures noires dans le chemin qui montait au bureau. Le ministre des finances du pouvoir de l'époque, en période d'Apartheid, a dit à tous les milliardaires réunis : " je sais que vous ne m'aimez pas et qu'aucun de vous n'a voté pour moi, mais je vous demande de me promettre de ramener des capitaux dans le pays pour éviter la banqueroute d'état qui nous menace à court terme. Et pour cela, je vais vous annoncer une nouvelle que vous ne répèterez à personne, même pas à vos épouses : nous allons libérer Nelson Mandela. " Les convives ont fait et tenu leur promesse. Mandela a été libéré. L'ANC a pris le pouvoir en douceur. Le leader noir, emprisonné pendant 27 ans, et Philippe De Clerk, dernier dirigeant de l'Afrique du Sud sous régime d'apartheid, ont reçu conjointement le Prix Nobel de la Paix en 1993.
Diplomate, grand voyageur, observateur et opportuniste, Mick Goss est un créateur insatiable. Il y a 30 ans, voyant qu'il peinait à placer les yearlings qui n'étaient pas du plus haut du panier, il crée chez lui à Summerhill la 1e vente breeze up de l'hémisphère sud, selon un modèle qu'il avait observé en Floride. Pour lancer sa vente, alors que le pays sortait à peine de l'Apartheid et semblait encore une autre planète aux yeux du monde, il se lance dans un système de promotion internationale révolutionnaire à l'époque, avec site internet et envoi de DVD des chevaux filmés au canter partout à travers la planète. Et ça marche. Les propriétaires du monde entier découvre l'Afrique du Sud, Summerhill, et Mick Goss se retrouve bientôt riche d'une clientèle allant des Yoshida au Japon jusqu'aux milliardaires américains en passant par les rois du pétrole du Moyen-Orient et même les aristocrates anglais. Pour ces derniers, il a encore fait un coup de maître, invitant juste après la libération de Nelson Mandela, tout ce qui pouvait se faire de puissant et de riche dans les courses anglaises lors d'un dîner de gala aux ventes de Newmarket pour leur dire que l'Afrique du Sud, dont les courses avaient pris leur modèle sur l'Angleterre, avaient aujourd'hui besoin d'eux pour reprendre vie. Les lords ont afflué dans le pays, pour y acheter des chevaux, les mettre à l'entraînement et venir les voir courir sur place pendant leurs vacances dans cette nouvelle destination au soleil !
Mick Goss a aussi créé une école pour former des futurs responsables dans les courses, à l'image des écoles des National Stud d'Irlande et d'Angleterre. Il a sorti de terre un hôtel de luxe avec des lodges au bord du lac comme dans les films, ainsi qu'un restaurant classé parmi les 5 plus chics du pays. Son effectif est monté jusqu'à 370 juments et 950 chevaux au total ! Tombé malade en Inde voici 2 ans, il a diminué son effectif à 200 poulinières. Désormais qu'il a recouvert la santé, il a retrouvé d'autant plus le moral qu'il voit le bout du tunnel, tant à la fin prochaine du pouvoir actuel du très corrompu Président Zuma, que sur le sujet de la quarantaine. Extrêmement contraignante aujourd'hui à cause de la maladie du cheval africain, obligeant les chevaux à une quarantaine de 6 mois dans le cadre de l'exportation ! Vu qu'il n'y a eu aucun cas depuis des lustres, la quarantaine devrait revenir à des standards internationaux d'ici la fin de l'année, ce qui devrait changer énormément de choses, dans le bon sens, pour les éleveurs sud-africains.
" Nos chevaux sont compétitifs au meilleur niveau mondial. Si vous analyser les performances réalisées à Dubaï dans les 12 dernières années, les chevaux d'Afrique du Sud ont remporté 6 UAE Derby, 4 fois le Gr.1 sur le sprint, 3 Duty Free, encore des Gr.1, 4 Godolphin Mile, et 3 fois dans les 3 premiers de la Dubaï World Cup. Ces résultats sont assez extraordinaires quand on pense que nos chevaux doivent passer 6 mois de quarantaine avant d'arriver prêt pour courir pendant une période aussi courte."
Pour de multiples raisons, notamment le niveau de vie locale qui est bas, les prix de pensions qui sont faibles (800 €) par mois ainsi que les allocations (3500 € pour un maiden), le rapport qualité prix des chevaux d'Afrique du Sud défie toute concurrence si on considère qu'ils figurent parmi l'élite mondiale, notamment grâce à des propriétaires-éleveurs très fortunés qui ont eu depuis longtemps les moyens de faire leur marché sur les grands marchés mondiaux. Ainsi, en 2017, le prix moyen d'un yearling lors des grandes ventes mondiales est de 102.000 € en Nouvelle-Zélande, 233.000 € en Australie, 247.000 € à Keeneland, 345.000 € à Tattersalls. En Afrique du Sud, le tarif est de 18.000 € à Johannesburg et 43.000 € à Cape Town. A de tels niveaux de prix, la clientèle internationale ne manquera pas de se précipiter pour acheter des chevaux, mâles ou femelles, les faire débuter sur place, et exporter les meilleurs puisque l'élite du pays a déjà prouvé être capable de gagner certaines des meilleures courses du monde.
Mick Goss cherche déjà à attirer une clientèle française. " Ce que je dois dire à mes amis, les éleveurs français, c'est qu'il y a une grande synergie entre nos 2 pays, en terme de Shuttle. Parce que nous non plus, on ne fait pas nos courses dans le même magasin que Coolmore, Lane's End, ou ce type de haras. Mais nous avons ici en AFrique du Sud des clients qui ont des moyens importants et qui seraient heureux de s'associer avec des professionnels français. D'ailleurs, nos statistiques démontrent que si l'Afrique du Sud a importé des poulinières de tous les grands pays du monde, Nouvelle Zélande, Australie Argentine, USA, Angleterre, Irlande et la France, ce sont bien les juments françaises qui ont eu le plus de succès chez nous."
Capetown Noir
LES ETALONS :
CAPETOWN NOIR :
Triple gagnant de Gr.1, Capetown Noir, fils de Western Winter avec une mère par Fort Wood qui a a conclu 3e des UAE Guinées, a remporté les Cape Guinées et et le Cape Derby à 3 ans, puis le Queen's Plate à 4 ans. Il est rentré au Haras en 2015.
ACT OF WAR :
Fils du grand Dynasty (Fort Wood), il a remporté 8 courses de 1200m à 1600m, dont les CApe Guinées. Sa mère Si Senorita (Cordoba par El Gran Senor) a été sacré poulinière de l'année en 2015, ayant produit Act of War mais aussi 2 autres gagnants de Groupe, Subastador et Luna de Victoria. Il est rentré au Haras en 2016.
WORLD OF MAGIC:
Fils de Dubawi avec une père par Tiercé (vainqueur du Golden Slipper), cet alezan est né en Australie en 2010 et a été importé en Afrique du Sud à 2 ans, âge où il a gagné un Gr.1 sur 1200 m à Turfontein. Encore gagnant de Gr.2 à 3 ans et 2e de Gr.1 à 4 ans, il est entré au haras en 2016.
Linngari
LINNGARI :
Bien connu en France où il a débuté étalon à Bonneval puis au Petit Tellier après une carrière de course exceptionnel couronnée par 2 victoires de Gr.1, il s'est montré améliorateur, père de plusieurs black-type dont le célèbre Galringari. Il appartient à un sud-africain, Rupert Plersch, qui l'a confié à Summerhill il y 3 ans. Ses premiers produits nés en Afrique du Sud ont 3 ans.