L'histoire de DNA : Dark Ronald, le patriarche allemand était fragile

14/05/2020 - Chef de race
Réputés pour leur solidité, les pur-sangs allemands descendent pourtant d'un chef de race particulièrement fragile ! Victime à deux reprises de claquage des tendons, Dark Ronald provenait de d'une piètre naissance. Thierry Grandsir (DNA Pedigrée) vous conte l'étonnant destin de ce patriarche qui dut sa survie à son incomparable beauté plastique.

DARK RONALD (1905-1928), par Bay Ronald et Darkie (Thurio)

 

L’élevage allemand se distingue de ses homologues européens à plus d’un titre : d’abord par un programme de courses quasi-exclusivement axé sur la distance classique (2400 m) et qui n’offre toujours aucun Gr.1 aux deux ans, aux sprinters ni aux milers ; et ensuite par une sélection drastique de ses reproducteurs, que ce soit sur le pedigree, le modèle, les aplombs, le tempérament et les performances.Par exemple, les mâles ayant couru aux USA sous Lasix, cette médication qui masque les tares respiratoires, ne sont pas admis à la reproduction outre-Rhin…

 


Dark Ronald, une splendeur physique.

 
Sur ces bases, érigées en 1869 avec la création du Deutsches Derby (Gr.1), le Pur-Sang Allemand est devenu cet animal noble et distingué, solide et de belle taille, alliant la tenue classique à une pointe de vitesse acérée. Sa génétique, outcross aux grandes souches internationales, repose essentiellement sur Dark Ronald, un splendide cheval noir élevé en 1905 en Irlande par Edward Kennedy.
 
Fils du bon cheval de handicaps Bay Ronald, passé à la postérité pour avoir conçu le Champion Bayardo (père de Gainsborough et grand-père de Hyperion), Dark Ronald était donc un petit-fils de Hampton, honnête vainqueur sur longues distances et sur les haies malgré un modeste 1,57 m au garrot et doté d’appuis franchement brassicourts…
 
 

HAMPTON, le grand-père de DARK RONALD, était un véritable laidron.
 
 
 
Dark Ronald n’était guère mieux loti du côté maternel de son pedigree. Certes, sa soeur cadette Désirée remportera plus tard les Gimcrack St. (Gr.2) à 2 ans mais leur mère n’était qu’une modeste placée et une fille du médiocre étalon Thurio, un vainqueur du Grand Prix de Paris (Gr.1) réorienté ensuite sur les gros handicaps. Qu’importe, et même s’il fallait remonter à sa quatrième mère Toison d’Or (Yorkshire Oaks) pour trouver un peu de classicisme dans sa famille, Dark Ronald était un animal qui sortait clairement de l’ordinaire. Puissant et bien équilibré, toisant 1,65 m bien qu’ayant hérité du garrot bas de sa lignée, sa noblesse suffit à lui faire afficher 1300 Guinées yearling à Doncaster, somme rondelette que n’hésita pas à débourser Sir Abraham Bailey pour l’acquérir.
 
Belle intuition, car Dark Ronald débuta victorieusement à 2 ans avant de se placer deuxième lors de sa sortie suivante, malheureusement accidenté. On lui appliqua les pointes de feu aux deux antérieurs, une pratique alors courante pour réparer des claquages (récemment proscrite par le code des courses), d’où une convalescence qui occupa toute son année de 3 ans en … Afrique du Sud, la patrie de son propriétaire !
 
De retour à 4 ans en GB avec deux " bananes " consolidées, Dark Ronald s’adjugea dès sa deuxième sortie la Durham Plate avec aisance puis la Royal Hunt Cup et les Princess of Wales’s St. (Gr.2), s’accidentant de nouveau dans la Doncaster Cup (troisième)… Avec un total de quatre victoires en sept sorties, Dark Ronald entra au haras en 1910 en GB avant son acquisition par les Haras Nationaux allemands en juin 1913. Bonne pioche, car sa génération 1912 fut celle de Vaucluse, lauréate des 1000 Guineas St. (Gr.1) à Newmarket ! 
 
 
De fait, Dark Ronald se classa cinq fois tête de liste des pères de gagnants en Allemagne, de 1918 à 1922 inclus. Il a volontiers transmis sa grande aptitude aux terrains lourds et une tenue dominante qui lui vaudra d’être qualifié Chef de Race version « Professionnel » (= vecteur de grand fond et d’aptitude à l’obstacle). Sa lignée mâle se développa par les propres frères Ambassador IV et Brown Prince II aux USA, Aditi en Russie, Nubier en Hongrie, Magpie en Australie, Dark Legend en Europe et Prunus (père de Oleander) sur tous les continents, etsubsiste aujourd’hui grâce aux branches établies par ses fils Herold et Son-in-Law. Des souches solides, qui contrastent avec la fragilité du patriarche !
 
 
 
 
 
 
Herold a produit Alchimist, le père de Birkhahn, lui-même grand-père de Surumu, le géniteur de Acatenango. Tous ont remporté le Deutsches Derby (Gr.1) et se sont classés plusieurs fois tête de liste des pères de gagnants outre-Rhin. De son côté, Son-in-Law érigea sa propre dynastie, notamment via Herbager dont le petit-fils Star Appeal devint le premier vainqueur du Prix de l’Arc de Triomphe (Gr.1) entraîné en Allemagne.
 
Son-in-Law est aussi le père de mère de Furioso, atteint de lenteur en course et incapable de sauter la moindre haie mais Chef de Race incontournable de la race du Selle Français, et présent dans le pedigree de nombreux Champions Olympiques de CSO, de CCE et de Dressage !
 
Si la race Holstein s’est développée à la faveur d’inbreedings très proches sur Dark Ronald, il n’est pas de tenue classique en courses sans ce grand Chef de Race dont le nom apparait à sept reprises dans le pedigree de Allegretta, la deuxième mère de Galileo et de Sea the Stars, six fois chez Cadoudal et plus de vingt fois dans le pedigree de Monsun !!!
 
 

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